L’heure est à la normalisation pour les économies occidentales. Et la Suisse ne devrait pas faire exception
Aux Etats-Unis et en Europe, l’activité dans les secteurs les plus sensibles aux taux d’intérêt a cessé de se détériorer et les marchés de l’emploi sont plus équilibrés. En Suisse, l’évolution est également encourageante, le baromètre conjoncturel KOF de janvier s’inscrivant en hausse pour le troisième mois consécutif. Certes, une croissance modeste, une inflation en recul et la perspective de réductions des taux d’intérêt ne constituent pas les ingrédients rêvés d’un boom économique, mais le ralentissement semble gérable dans la plupart des économies.
En nous appuyant sur un large éventail d’indicateurs et de modèles économiques, nous estimons la probabilité d’une récession aux Etats-Unis à seulement 10%, contre 70% pour un atterrissage en douceur. L’éventualité d’une réaccélération économique stimulée par une hausse des revenus réels dopant la demande intérieure nous paraît équivalente au risque d’un atterrissage brutal. En Suisse également, les chocs extérieurs s’atténuent et nous prévoyons une croissance du produit intérieur brut réel de 1,3% cette année.
En parallèle, le cycle de resserrement monétaire arrive à son terme dans les principales économies. La désinflation ouvre la voie aux baisses des taux directeurs par la Réserve fédérale américaine et par la Banque centrale européenne dans les mois à venir. Pour l’instant, rien n’indique une deuxième vague d’inflation due à une augmentation des prix du pétrole ou des coûts de fret maritime, mais ces indicateurs doivent être surveillés de près. De plus, le contexte géopolitique et un calendrier électoral chargé dans de nombreux pays incitent les investisseurs à la prudence en 2024.
> Le contexte géopolitique et un calendrier électoral chargé dans de nombreux pays incitent les investisseurs à la prudence en 2024.
En Suisse, plusieurs aspects structurels ont joué un rôle crucial dans le maintien de l’inflation à un niveau inférieur à celui des autres économies développées, tels qu’un mix énergétique favorable reposant sur l’hydroélectrique et le nucléaire, et le revirement de la politique de la Banque nationale suisse (BNS). A l’instar des autres banques centrales, la BNS a relevé son taux directeur, le faisant passer à 1,75% actuellement. Elle a également utilisé son bilan de façon très efficace, en vendant des devises étrangères, ce qui a soutenu le franc suisse et limité l’inflation importée – une variable clé pour une économie ouverte. Avec une inflation de retour à la normale, nous anticipons une baisse des taux directeurs de 50 points de base cette année, pour atteindre un niveau terminal de 1,25% fin décembre.
![Le bilan de la BNS s’est contracté à mesure que la banque centrale a vendu des devises
étrangères pour acheter du franc. — © DR](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/d73aba9e-41bc-42cf-a591-f7d2dc59bf3d "Le bilan de la BNS s’est contracté à mesure que la banque centrale a vendu des devises
étrangères pour acheter du franc. — © DR")
### Quid de la stratégie d’investissement?
Quelles sont les implications de cette toile de fond économique pour notre stratégie d’investissement? Malgré l’assouplissement monétaire à venir, un environnement de taux d’intérêt plus élevés qu’avant la pandémie a augmenté les rendements attendus pour les obligations et les actifs sensibles aux taux. Nous avons révisé notre allocation d’actifs stratégique afin de refléter le fait que les portefeuilles pourront atteindre leurs objectifs de rendement avec un risque moindre et davantage de concentration sur le cœur des portefeuilles, en privilégiant les actifs américains et de qualité.
Sur un horizon d’investissement à court terme, nous maintenons un positionnement de portefeuille équilibré. Nos allocations aux actions s’établissent aux niveaux stratégiques. Sur le marché des taux, nous privilégions les obligations gouvernementales, en particulier les bons du Trésor américain, le crédit de qualité et les titres les mieux notés du crédit à haut rendement. Du côté des devises, le dollar devrait se redresser grâce aux avantages de l’économie américaine en termes de croissance et de taux. Nous nous attendons également à une poursuite de la force du franc suisse à moyen terme, quand bien même sa récente surperformance pourrait s’essouffler par rapport au dollar et à l’euro au premier trimestre, après une forte appréciation en 2023. Dans l’ensemble, les regains de volatilité sur les marchés pourraient offrir l’opportunité d’accroître l’exposition aux actifs risqués.