Que faire de sa propriété immobilière en cas de divorce?
Près de 40% des mariages se soldent par un divorce en Suisse, entraînant souvent des conséquences financières importantes, en particulier si les époux sont propriétaires d’un bien immobilier. En effet, au moment du divorce, le patrimoine commun du couple est réparti entre les conjoints selon des règles spécifiques au régime matrimonial choisi et, souvent, la propriété du bien immobilier est modifiée
Changement de la propriété immobilière au moment du divorce: vente à un tiers ou transfert au sein du couple
Prenons l’exemple d’un couple qui se marie en 2000 sous le régime ordinaire de la participation aux acquêts. En 2010, les conjoints acquièrent un immeuble en copropriété pour une demie chacun, financé par leurs acquêts, pour 1 million de francs. En 2020, au moment de leur divorce, la valeur de l’immeuble est évaluée à 2 millions de francs (valeur admise par les deux conjoints sur la base d’une estimation).
Au moment du divorce, ce couple a tout d’abord la possibilité de vendre son bien à un tiers. C’est une solution fréquemment choisie si aucun des conjoints ne peut assumer seul les charges de l’immeuble (dette hypothécaire, frais d’entretien, etc.). Le produit de la vente de l’immeuble est alors attribué à chacun des époux en fonction de sa quote-part de propriété et de son investissement initial. Dans ce cas, ils recevront chacun 1 million de francs. Tous deux devront individuellement soit s’acquitter de l’impôt sur les gains immobiliers immédiatement, soit réinvestir leur gain personnel dans une nouvelle résidence principale individuelle pour en reporter l’imposition ultérieurement.
Les époux peuvent également convenir que l’un des deux acquière l’intégralité de la propriété. Le conjoint qui garde l’immeuble devra dans ce cas dédommager l’autre d’un montant de 500 000 francs, équivalant à la moitié du montant correspondant à l’augmentation de valeur du bien de 1 million de francs, car le bien a été financé par des acquêts. Ce dédommagement peut être fait par compensation avec d’autres actifs dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial. Le transfert de la propriété intervient au jour du prononcé du divorce.
Dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, l’imposition du gain immobilier réalisé par l’époux transférant peut être différée à condition que les deux conjoints l’acceptent. En l’absence d’accord, le transfert de la propriété de l’immeuble déclenchera immédiatement l’imposition du gain immobilier chez l’époux transférant. Le différé a plusieurs avantages: pour le conjoint qui cède sa part, le transfert du bien immobilier n’induit pas un besoin de liquidités pour le paiement de l’impôt; pour le conjoint qui acquiert la pleine propriété, le gain immobilier réalisé lors d’une vente future de l’immeuble serait imposé à un taux plus bas, car il est dégressif en fonction de la durée de détention.
En cas de transfert de la propriété entre les époux, des droits de mutation pourraient être dus par le conjoint repreneur. Néanmoins, la plupart des cantons prévoient une exonération de ces droits ou une réduction de leur taux d’imposition si le transfert a lieu dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial.
Usage de l’immeuble comme contribution d’entretien en nature
Il est finalement envisageable qu’aucun transfert de propriété n’ait lieu, mais que l’un des deux conjoints demeure dans l’immeuble, souvent avec les enfants.
Cette mise à disposition de l’usage, de préférence par la constitution d’un usufruit ou d’un droit d’habitation, est une contribution d’entretien en nature qui doit être intégrée à la convention de divorce ratifiée par le juge. La valeur de l’usage correspond généralement à la valeur locative du bien. Plusieurs aspects fiscaux doivent toutefois être considérés.
Les contributions d’entretien sont imposables chez l’ex-conjoint et les enfants mineurs qui en bénéficient, respectivement déductibles du revenu de celui qui les verse (le propriétaire). Attention toutefois à bien distinguer la part de l’usage des enfants de celle de l’ex-conjoint, car une fois ces derniers majeurs, la déductibilité fiscale de la contribution d’entretien qui leur est versée ne sera plus admise.
En outre, la responsabilité financière des frais d’entretien d’immeuble ainsi que de la dette hypothécaire et ses intérêts devrait aussi être réglée dans la convention de divorce. Leur déductibilité fiscale devra être analysée en fonction du droit d’usage octroyé.
Transmettre ou revendre un bien immobilier lors d’un divorce a de nombreuses implications, en particulier sur le plan fiscal. Chaque situation étant différente, il peut être avisé de recourir aux conseils d’un spécialiste pour évaluer quelle solution est la mieux adaptée à sa situation spécifique.