
Créer un impact positif sur la nature et la communauté locale, c’est l’ambition de l’hôtellerie dite «régénérative». Plusieurs établissements suisses poursuivent désormais ce nouvel idéal
Dans la réception de l’Hôtel des Horlogers, au Brassus, du bois flottant et des plantes en pot remplacent les traditionnels arrangements de fleurs coupées. Sur le comptoir, des crayons contenant des graines de thym encapsulées à leur extrémité sont proposés au lieu des habituels stylos-billes en métal brillant. Des bornes de recharge pour voitures électriques occupent une partie du parking. Un grand jardin potager et des toitures végétalisées permettent d’assurer la production de légumes et d’herbes aromatiques pendant la belle saison. Et au bar, le café rwandais, torréfié en Suisse, est proposé à 3,40 francs, «le prix le plus bas de toute la vallée de Joux, pour que les habitants puissent en profiter s’ils le souhaitent», assure André Cheminade, directeur de ce boutique-hôtel appartenant à Audemars Piguet, inauguré en 2022. Conçu par les architectes danois du cabinet BIG (Bjarke Ingels Group), il a été pensé pour réduire au maximum son empreinte sur l’environnement et intégrer le principe d’écoresponsabilité, aussi bien dans son fonctionnement quotidien que lors de sa construction (bois provenant de la forêt locale, pierre de la région, béton recyclé et matériaux exempts d’émissions), faisant de lui le premier hôtel suisse à obtenir la certification Minergie-Eco.
Cette approche établit cet hôtel comme exemple en matière d’hospitalité qualifiée de «régénérative». En plein essor depuis la reprise post-covid, le tourisme «régénératif» s’attelle à créer une spirale vertueuse dans le secteur, au même titre que la permaculture dans les milieux agricoles. «Les entreprises suivant ce type d’approche cherchent non seulement à limiter les effets négatifs de leur implantation, mais à créer un impact positif en redonnant davantage aux personnes et à la planète que ce qui est consommé pour faire fonctionner leur structure. En d’autres mots, leur présence est bénéfique pour le lieu, la nature environnante et ses habitants», analyse Sarah Balet, adjointe scientifique à l’Institut de recherche tourisme de la HES-SO Valais qui a étudié en 2022 comment ce nouveau paradigme influence le secteur hôtelier en Suisse, avec les professeurs Roland Schegg de la HES-SO Valais et Alessandro Inversini de l’EHL. Si le concept de durabilité progresse, notamment avec l’idée de limiter les déchets ou de réduire la quantité de linges et draps lavés, le niveau «régénératif» s’intègre dans toute la gestion hôtelière et le modèle d’affaires. «C’est un véritable changement d’état d’esprit sur la manière de faire ce métier», résume Sarah Balet.
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