
La maison mère de Facebook, Whatsapp et Instagram doit verser près d’un demi-milliard d’euros pour compenser la perte de revenus en publicité numérique des médias durant les cinq années où elle a violé la réglementation européenne sur la protection des données personnelles
A l’issue d’un procès de plus d’un mois, la justice espagnole a condamné Meta, maison mère de Facebook, Whatsapp et d’Instagram, à verser près de 480 millions à des médias locaux pour «concurrence déloyale», pour ne pas avoir respecté la réglementation européenne sur la protection des données personnelles, une somme assortie de 60 millions d’euros d’intérêts légaux.
«Le tribunal de commerce n°15 de Madrid condamne Meta à payer 479 millions d’euros à 87 éditeurs de presse numérique espagnole et agences de presse membres de l’AMI (Association des médias d’information) pour avoir obtenu un avantage concurrentiel significatif en réalisant de la publicité sur ses réseaux sociaux Facebook et Instagram en violation du Règlement général sur la protection des données (RGPD)», indique jeudi le communiqué.
L’AMI avait déposé plainte en décembre 2023 contre Meta Irlande, siège européen du groupe, lui réclamant 551 millions d’euros pour concurrence déloyale dans la vente de publicité numérique, estimant que le géant avait utilisé les données des internautes sans leur consentement afin de créer des profils publicitaires individualisés.
Une plainte similaire en cours en France
«Meta Irlande, siège de Meta Espagne, n’a pas fourni au tribunal les comptes de ses activités en Espagne», explique le communiqué du tribunal. Le juge s’est donc appuyé sur les données fournies par la presse numérique espagnole pour évaluer les gains dans le pays de Meta grâce à son activité publicitaire en ligne, estimés à plus de 5,3 milliards d’euros pendant les cinq années qu’a duré l’infraction (du 25 mai 2018, date d’entrée en vigueur du RGPD, au 1er août 2023, date à laquelle Meta a proposé à nouveau à l’utilisateur de donner ou non son consentement).
Le juge a estimé qu’une partie de cet argent devait «être redistribué aux autres concurrents du marché publicitaire espagnol, parmi lesquels la presse numérique espagnole» car il avait été gagné «en violant le RGPD». Il a donc effectué un calcul pour évaluer «les préjudices causés à la presse numérique espagnole avec une vraisemblance raisonnable», à savoir le manque à gagner dû aux actions de Meta et la «perte de revenus en publicité numérique».
«Le juge présume que le montant gagné était supérieur, car si cela avait été inférieur, Meta aurait présenté les comptes de ses activités en Espagne dans le cadre de la procédure», poursuit le communiqué.
Le tribunal précise par ailleurs qu’une plainte similaire est en cours en France et que ce jugement souligne «le rôle fondamental de la législation en matière de concurrence dans le contrôle des abus lié au traitement illicite des données personnelles et le pouvoir informatif et économique immense des géants technologiques».