
ÉDITORIAL. Avec ses gesticulations incontrôlées, Donald Trump s’emploie surtout à enrayer l’inexorable essor de la Chine, un problème réel pour l’Occident. Sans toutefois trouver la bonne parade
La montagne a accouché d’une souris. Si Donald Trump a bien craché cette semaine sur son réseau social une batterie de droits de douane arbitraires pour une vingtaine de pays, il a une nouvelle fois repoussé leur entrée en vigueur, au 1er août. Date également retenue pour taxer à raison de 50% le cuivre.
Sans surprise, le cours de cette matière première cruciale pour la transition énergétique ou pour l’armement a bondi, tout comme celui du café puisque le Brésil est également un des nouveaux boucs émissaires du président américain. Une surtaxe de 40% lui pend au nez pour la «chasse aux sorcières» qu’il mènerait contre l’ancien président Jair Bolsonaro.
La Chine dans le viseur
Pour le reste, les acteurs des marchés financiers n’ont pratiquement pas bronché. Pas d’effondrement par exemple des valeurs de la pharma, menacée de droits de douane de 200%. Jeudi à la mi-journée, les actions de NOVARTIS et de ROCHE, poids lourds de cette industrie, narguaient même Donald Trump en évoluant dans le vert.
Lire aussi: Roche et NOVARTIS veulent investir des milliards dans des usines américaines. Mais il n’y a pas que les ouvriers du bâtiment qui se font rares aux Etats-UnisEn sera-t-il ainsi longtemps? Rien n’est moins sûr car – à l’instar de la Suisse –, l’Union européenne, l’Inde mais aussi le Canada et le Mexique ne savent toujours pas à quelle sauce l’ogre protectionniste veut les dévorer. A la tête de la première puissance économique mondiale, l’ancien promoteur immobilier garde une capacité de nuisance considérable. Son caractère narcissique et imprévisible l’amènera sans doute à promulguer d’autres décrets qui mettront les bourses mondiales sur le qui-vive. Ces mesures ne suffiront toutefois pas à inverser le cours de l’Histoire contre lequel le républicain lutte avec une maladresse qui serait touchante si elle n’était pas si dangereuse.
Le bon diagnostic
En voulant contrer le titan chinois, Donald Trump révèle avec justesse la vulnérabilité des sociétés occidentales qui, telle la cigale de La Fontaine, ont dansé sur le dos de Pékin et se retrouvent nues une fois l’hiver venu. Il se trompe en revanche de remède et ouvre trop de fronts.
Difficile en effet d’imaginer que le milliardaire américain arrive à convaincre ses compatriotes de retourner au temps du charbon pour affranchir leur pays de sa dépendance par rapport à celle que plus personne n’appelle «l’usine du monde» tant son développement a été fulgurant. En se mettant la planète à dos, Donald Trump pousse, qui plus est, ses alliés à chercher à gagner en indépendance.
Pour livrer la bataille du siècle, les Etats-Unis ont de bien meilleures cartes dans leur jeu, à commencer par leurs valeurs démocratiques et leur suprématie technologique. Des atouts que Donald Trump malmène au lieu de les mettre à profit. Qu’en restera-t-il au terme de son mandat? Pour beaucoup, les trois ans et demi à venir s’annoncent encore très longs.