
EDITORIAL. Le président américain a lancé des attaques frontales contre le reste du monde, en annonçant des droits de douane très élevés. Quel est le plan de la Suisse? L’heure est à l’incompréhension et sa marge de manœuvre est faible
Les mots sont révélateurs. Les droits de douane annoncés par Donald Trump sont le résultat d’une «formule simpliste», «rudimentaire». Même si les équipes ont travaillé toute la nuit, on ne sait pas s’il s’agit de 31% ou 32%. Les mesures sont «incompréhensibles», créent une situation «loose loose». On donne le numéro d’une hot-line pour les PME et on parle déjà du soutien offert par les mesures de chômage partiel. Face à la presse, la présidente de la confédération, le ministre de l’économie suisse et leurs équipes se sont dits déçus mais sont apparus sonnés.
Cette Suisse rassurée par la visite récente de la secrétaire d’Etat Helene Budliger à Washington, convaincue qu’elle se comportait suffisamment bien pour passer entre les gouttes, elle, nation libérale amie de la puissance américaine, s’est pris un coup de poing. C’était oublier que l’allié, lui, a transmuté. A Munich, JD Vance avait annoncé la rupture politique, la fin de l’alliance transatlantique. Dans le jardin de la Maison Blanche, son président a liquidé l’économie multilatérale, celle qui respecte des règles communes, qui a porté la prospérité occidentale depuis 80 ans.
Ailleurs dans le monde, les pays visés par l’artillerie trumpienne réagissaient de la même manière, cherchant à comprendre et à mesurer l’ampleur des dégâts. L’économie mondiale subit déjà les conséquences de ces décisions brutales. Les marchés financiers ont encaissé. L’incertitude est maximale et la suite est réservée, en fonction de l’ampleur des mesures de rétorsion et des transactions du président américain.
Mise à l’épreuve
Il faudra tout le talent des diplomates suisses pour négocier et chercher d’autres voies. Parmi celles-ci, la cote de l’Europe remonte soudainement. La Chine devient encore plus amie, les négociations avec l’Inde et les pays du Mercosur gagnent en importance. Il faudra regarder plus loin, au Moyen orient, en Afrique, ailleurs. La Suisse, qui dépend tant de son industrie d’exportation, devra user de tous ses atouts pour convaincre. D’abord les Américains, mais aussi tous les autres.
La résilience des entreprises sera mise à l’épreuve des éventuels tarifs douaniers et de ce nouvel environnement. Des produits d’une qualité imbattable, une esthétique hors du commun, une nouveauté indispensable: seules ces forces-là, issues de la recherche de pointe, l’excellence de la formation et un environnement politique stimulant l’innovation pourront faire la différence. La Suisse en a certainement les moyens.