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Source : LeTemps.ch - il y a 52 jour(s)

On a tous quelque chose à apprendre de Pierre-Yves Maillard

Le président de l’Union syndicale suisse s’est imposé comme la figure incontournable du paysage politique suisse, une stature renforcée par le oui à la 13e rente AVS. Dans les entreprises comme dans les parlements, les leaders ont des points communs dont il est possible de s’inspirer

Avant même que janvier n’ait rendu son dernier souffle, il avait été désigné comme l’homme suisse «le plus puissant de 2024» par le Blick. «Maillard, l’ami public numéro un», titrait encore 24 heures dimanche dernier, au moment du vote massif et historique en faveur de la 13e rente AVS, qui doit beaucoup au président de l’Union syndicale suisse (USS).

Si le Vaudois n’oublie jamais de chanter les vertus de l’effort collectif, il incarne plus que jamais la figure du leader en Suisse. Une dimension qui contribue à la victoire en politique. «En Suisse, nous n’aimons en général pas les têtes qui dépassent, mais nous avons réalisé ces dernières années que la politique s’articule souvent autour de quelques personnes clés», analyse Pascal Sciarini, politologue à l’Université de Genève. Selon lui, dans un contexte de médiatisation et de personnalisation accrue de la politique, il est important pour les votantes et votants d’avoir une personne, dont ils connaissent les valeurs, qui incarne un programme ou un projet.

«Il est plus facile dans un monde qui se complexifie d’avoir recours à ces personnes qui servent de raccourcis d’informations, développe le politologue. Ils ou elles servent de locomotive même s’il y a derrière des militants qui font campagne sur le terrain. Blocher pour l’UDC ou Thomas Minder [petit entrepreneur, son initiative populaire fédérale contre les rémunérations abusives a été approuvée en 2013, ndlr] ont par exemple joué ce genre de rôle.» **Notre podcast:** [Pierre-Yves Maillard sur l’AVS: «Si ça ne passe pas cette fois, la colère des gens va être forte!»](https://www.letemps.ch/podcasts/sous-la-coupole/pierre-yves-maillard-sur-l-avs-si-ca-ne-passe-pas-cette-fois-la-colere-des-gens-va-etre-forte) ### Un leadership construit aussi En leur temps, Christoph Blocher, Doris Leuthard, le fondateur du groupe horloger Swatch Group, Nicolas Hayek, dans les milieux économiques, Pierre-Yves Maillard aujourd’hui… et tant d’autres aux profils différents qui ont su guider, influencer ou inspirer les foules. Alors concrètement, de quel bois sont faits ces hommes et ces femmes dont le leadership sort du lot? «Il n’y a pas de profil ou de parcours types, mais il est important que la personne incarne de manière crédible les valeurs qu’elle défend, comme c’est le cas de Pierre-Yves Maillard, qui vient d’un milieu populaire. Il faut aussi une bonne maîtrise des dossiers, avoir le sens de la formule, un côté tribun et charismatique. Et une petite dose de populisme ne fait pas de mal.» En politique particulièrement, outre la personnalité, les circonstances jouent aussi un rôle important dans la promotion d’un profil, rappelle Pascal Sciarini. Les dimensions de leadership et de charisme comprennent nombre de facteurs, insiste pour sa part Felix Bühlmann, professeur de sociologie à l’Université de Lausanne, spécialiste des élites. Dans le cas de Pierre-Yves Maillard, il constate qu’un «parcours traditionnel à travers tous les échelons politiques, une sorte d’artisanat politique, a fait sa force de frappe.» Plus globalement, il souligne que si le charisme a une connotation presque religieuse, «le lien émotionnel avec un leader est aussi souvent soutenu par une campagne politique, une certaine mise en scène ou certains formats médiatiques qui contribuent à créer un imaginaire de charisme. C’est aussi le cas dans l’économie. A l’image de la Silicon Valley, la mise en avant et la production d’une telle figure, comme dans le cas de Steve Jobs, peuvent aider au succès d’une entreprise.» ### Crédibilité, expertise et confiance Justement, les qualités requises pour un leader sont-elles les mêmes, adaptées au contexte, dans les milieux économiques? «Les comptes à rendre ne sont pas les mêmes. Mais la crédibilité et la capacité à susciter de la confiance sont valables aussi», répond Pascal Sciarini. Pour John Antonakis, professeur HEC à l’Université de Lausanne et spécialiste en leadership, peu importe le domaine: «Le leader qui parvient à créer une connexion avec les gens le fait à travers ses valeurs, des symboles, des métaphores et des émotions. Il s’agit beaucoup d’un recours à la rhétorique au sens d’Aristote avec l’ethos (image de l’orateur), le logos (logique) et le pathos (convaincre par l’émotion), qui traverse les siècles et les lieux.» Un leader est écouté, résume John Antonakis, quand il est expert dans son domaine, qu’on peut concrètement observer ses actions et qu’il est intègre: il fait ce qu’il dit. «Comme Pierre-Yves Maillard, il s’agit de se montrer engagé, de mettre des mots sur ce que le collectif ressent mais aussi d’accorder du crédit aux personnes qui travaillent avec soi», complète-t-il. Dimanche soir, certains regrettaient l’absence de figure rassembleuse à droite. Dans les milieux économiques, beaucoup déplorent aussi un manque de personnages visionnaires qui s’invitent dans le débat, comme le faisait Nicolas Hayek à son époque. Même si au sein des entreprises, nombre de petits leaders plus «invisibles» suscitent l’adhésion et ont un impact. «Pour qu’une société réussisse, je pense qu’il faut surtout qu’elle ait un leader à sa tête, c’est-à-dire une personnalité qui soit capable de focaliser l’entreprise et ses collaborateurs sur un objectif précis», recommandait en ce sens Cédric Moret patron de la société ELCA Informatique [dans un article du _Temps_ le mois dernier.](https://www.letemps.ch/economie/carrieres/ingenieur-ou-manager-dilemme-au-sommet-des-entreprises-technologiques) ### Une rhétorique qui s’apprend Un constat qui interroge sur la possibilité de développer une telle aura.[Dans une interview qu’elle donnait au _Temps_ la semaine passée,](https://www.letemps.ch/economie/carrieres/julia-de-funes-nous-n-avons-jamais-autant-parle-de-bonheur-en-entreprise-et-il-n-y-a-jamais-eu-autant-de-burn-out#:~:text=En 2020, Julia de Funès,nouvelle matière intellectuelle à pétrir.) la philosophe du travail française Julia de Funès relevait que les formations en management visent souvent «à faire entrer le manager dans une «posture.» Or, argumentait-elle en citant Nietzsche, le charisme et le leadership ne proviennent jamais d’une posture, mais du courage d’être soi-même.» Le leadership peut-il s’apprendre? John Antonakis estime que oui dans le sens où la rhétorique s’enseigne et que ses effets s’observent. «Margaret Thatcher avait un côté très froid mais a beaucoup travaillé sa rhétorique. Même Alexandre le Grand a appris avec le maître Aristote! Bien sûr, il faut avoir l’éducation nécessaire et une certaine intelligence. Mais la capacité à communiquer peut s’apprendre, même si certains sont bien sûr plus doués que d’autres.» ### Qu'est-ce que le charisme? Ce qu’on appelle charisme, c’est finalement la capacité à convaincre, décortique Felix Bühlmann. «Cela peut aussi s’apprendre petit à petit dans un cadre plus restreint puis plus important. C’est ce qu’a fait Pierre-Yves Maillard en commençant au niveau communal, puis en passant au niveau cantonal et fédéral.» Quant à la dimension potentiellement «genrée» du leadership qui valoriserait des voix graves et de fortes statures, Pascal Sciarini estime que la question n’est pas là. «Toutes les caractéristiques du leadership peuvent aussi valoir pour les femmes, on l’a vu avec Doris Leuthard ou Micheline Calmy-Rey par exemple qui ont notamment joué des rôles importants dans des décisions liées à des votations. Ce qui empêche aujourd’hui d’avoir autant de femmes que d’hommes leaders est un problème plus structurel.» Une étude qu’il réalise actuellement avec son doctorant Matthieu Jost, appuie John Antonakis, montre que la hauteur de la voix ne joue pas de rôle dans la capacité à convaincre. «Certaines personnes sont aussi très charismatiques avec une voix très douce, comme Nelson Mandela ou Mahatma Gandhi, ou assez aiguë comme Margaret Thatcher.» Dans tous les cas, même si certains réclament aujourd’hui des organisations plus horizontales – sachant qu’en Suisse la politique l’est déjà beaucoup en comparaison internationale – le besoin de figures fortes est toujours là, y compris pour les plus jeunes, selon John Antonakis. «Regardez Greta Thunberg: adolescente déjà, elle arrivait à faire déplacer des foules à travers le monde!» Et le profil de la jeune femme montre bien que les leaders n’ont pas toujours une voix de basse ou de larges épaules.

Jeudi 07 mars 2024, 06h00 - LIRE LA SUITE
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