
EDITORIAL. Plus encore qu’en 2008, après le sauvetage in extremis d’UBS, la Suisse a fait son exercice d’introspection suite au naufrage de Credit Suisse. Réussira-t-elle cette fois à vraiment tirer les leçons d’une débâcle indigne d’une puissance financière?
De la nonchalance de l’ancien conseiller fédéral Ueli Maurer aux manquements des autorités, le très attendu rapport de la Commission d’enquête parlementaire (CEP) a confirmé vendredi des vilains doutes qui avaient émergé à la suite de la mortifiante agonie de Credit Suisse.
Malgré les erreurs commises par la Confédération dans cette débâcle qui a marqué d’une pierre noire l’histoire de la place financière suisse, ce sont évidemment en premier lieu les anciens dirigeants de la banque qui ont causé sa perte. Un constat qui amène la seule question qui compte aujourd’hui: comment éviter que pareille catastrophe se reproduise, qui plus est alors que la Suisse dispose désormais d’une seule banque d’importance systémique internationale?
Des scandales bancaires réguliers
Entre l’explosion de la bulle immobilière des années 90 qui avait précipité des banques cantonales au bord du gouffre et le sauvetage in extremis d’UBS par la Confédération en 2008, les crises bancaires semblent bien faire partie intégrante de la vie économique du pays et la Suisse n’aura pas le droit à l’erreur lors de la prochaine.
Renforcer les compétences de la Finma, clarifier les rôles décisionnels des autorités de surveillance, avoir UBS à l’œil… Les précieuses recommandations émises par la CEP vont certainement donner lieu à d’âpres batailles politiques. Celles qui se concrétiseront ne manqueront pas d’être attaquées dès que la mémoire vive de la piteuse fin du numéro deux bancaire suisse s’estompera.
L’érosion de la vigilance d’une partie de la classe politique durant les années 2010, l’incompréhensible assouplissement réglementaire que la Finma a octroyé à CREDIT SUISSE en 2017 n’incitent en effet guère à l’optimisme tant le risque est grand qu’au fil des années, un même scénario se reproduise et que le dogme de l’autorégulation s’impose à nouveau.
Pas d’autorégulation en finance
C’est tout le contraire qu’on attend de la Confédération. Parce qu’elle est une puissance financière, la très petite Suisse doit être à la hauteur de ce statut et cesser de jouer avec le feu en se berçant de l’illusion qu’au bout du compte, elle parvient toujours à «bricoler» des solutions peu coûteuses à des crises financières existentielles.
Faut-il corseter davantage une très grande UBS qui ne comprend pas pourquoi, après avoir contribué à éviter le pire, elle est désormais perçue comme une menace? Peut-être. Durcir encore sa couverture en fonds propres ne suffira toutefois pas. Plus que tout, il s’agira surtout de rester sur le qui-vive et d’intervenir à la moindre alerte. Nos autorités sauront-elles enfin se hisser au niveau? Rendez-vous dans 15 ans pour le savoir.