
Dans son roman aussi célèbre que violent, Bret Easton Ellis raconte le quotidien d’un jeune financier psychopathe, se faisant l’écho par la caricature d’une économie américaine des années 1980 en pleine transformation
Côté pile, Patrick Bateman est un séduisant financier diplômé de la Harvard Business School. Il travaille dans les fusions et acquisitions au sein de la société d’investissement fictive Pierce & Pierce, située à Wall Street. Côté face, c’est un psychopathe qui insulte, humilie, viole, torture et tue au cœur de New York, dans les années 1980. Vous avez peut-être reconnu le terrible protagoniste d’American Psycho, le célèbre et ultra-violent roman de Bret Easton Ellis, paru en 1991, puis adapté au cinéma en l’an 2000.
Le cadre et la décennie dans laquelle sévit Patrick Bateman ne sont évidemment pas dus au hasard: ils représentent un moment particulier dans l’histoire économique des Etats-Unis, le tournant des années 1980. Alexia Blin, maîtresse de conférences en histoire et civilisation des Etats-Unis, Université Sorbonne-Nouvelle (Paris 3), raconte: «Le président Ronald Reagan est arrivé au pouvoir en 1981 et cette période est celle d’un reaganisme triomphant. Ses mesures économiques ont accéléré la transformation de l’économie américaine vers la financiarisation.» En effet, l’industrie pesait pour environ 25% du PIB américain dans les années 1970, avant un important déclin jusqu’à n’en représenter que 10% à la fin du siècle, appuie l’historienne. «En parallèle, la finance prend de plus en plus d’importance, sur fond de politiques publiques de dérégulations et de baisses d’impôts pour les plus riches et les grandes entreprises.»
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