Le temps n’a pas de teinte, mais les montres si. Et le noir intégral occupe une place à part sur la large palette de l’horloger. Sa sobriété sans compromis est une manière d’affirmer technicité et audace, parfois jusqu’à masquer l’heure
Les horlogers ont mis les doigts dans l’encrier il y a déjà quelques décennies et ne les ont plus ressortis. Le noir total n’est pas qu’un costume, c’est un bain de révélateur, l’expression directe de l’exploit technique et de la prise de risque. Plus le résultat est sombre, plus le message est clair. Car noircir un cadran ou une aiguille peut se faire d’un jet de peinture, mais faire tenir la nuit sur une boîte ou un mécanisme est une autre affaire. Pour y parvenir, il faut éteindre le falot de la tradition et penser en physicien, tester de nouveaux matériaux, greffer des technologies venues d’ailleurs, comme le carbone forgé ou la céramique technique. Et à chaque fois, le grand bal de l’innovation s’ouvre en tenue de corbeau.
OMEGA – Speedmaster Dark Side of the Moon
Chronographe, boîtier céramique, 13 500 francs
Le fabricant biennois donne un coup de frais à une histoire qui remonte à 2013. Cette année-là, Omega ouvre la collection «Dark Side of the Moon», en référence à la première exploration de l’orbite lunaire par l’équipe d’Apollo 8 et aux fameuses paroles de l’astronaute James Lovell prononcées juste avant de passer derrière la Lune: «Nous vous verrons de l’autre côté.» La Dark Side of the Moon inaugurale est naturellement noire et marque un tournant: il s’agit de la première collection Speedmaster en céramique. L’édition 2025 embarque son lot d’avancées technologiques et se décline en sept modèles. Le plus sombre, nommé «Dark Dark», est charbonneux jusqu’au cœur de son mécanisme.
Panerai, manufacture neuchâteloise née Officine à Florence, revisite sans se lasser les deux modèles qui ont bâti son histoire, la Radiomir et la Luminor. Cette version, noir de noir, de la Luminor doit sa nouveauté à son format et à sa matière: 40 mm et céramique. C’est une première, sans doute pas une dernière. Limitée par son design de base, la marque est passée maître dans les variations sur thèmes. Tout le jeu consiste à donner un esprit différent à ces montres aux origines militaires, plus urbain, plus mode, voire plus féminin – ce qui n’est pas le cas ici. L’échappée par la technicité fait évidemment partie des options.
Certains costumes noirs se portent les jours de fête. Celui de cette Tissot PRX spéciale est de cette étoffe-là. Le communiqué officiel annonce la couleur: «Chaque détail de cette montre porte l’empreinte du passé, une célébration nostalgique de ceux qui ont façonné nos rêves. Un véritable retour en enfance.» L’édition, limitée à 1975 exemplaires, célèbre le jubilé de Goldorak, inventé par le mangaka Go Nagai… en 1975. De jour, le héros apparaît discrètement dans la pénombre du cadran. De nuit, le robot de l’espace, tracé au Super-LumiNova, devient lumineux. La pièce fait écho à un modèle hommage à la série animée présenté en 2024.
TAG HEUER – Monaco Flyback Chronograph TH-Carbonspring
Chronographe à rattrapante, boîtier carbone, 17 000 francs
En horlogerie, l’innovation tient souvent à un cheveu. TAG Heuer en a encore fait la preuve cet automne avec un inédit ressort spiral en carbone – c’est le ressort qui permet au mouvement de la montre de battre la mesure. L’invention de l’organe remonte à 1675, par Christian Huygens. Sa première grande révolution date des années 1930, avec l’élinvar, un alliage encore utilisé de nos jours. Puis, il y a eu le silicium au milieu des années 2000. TAG Heuer a pris six ans pour mettre au point sa nouveauté, en partant d’un prototype présenté en 2019. Pour l’occasion, la maison a habillé son emblématique Monaco tout en carbone.