Moins d’un an après le rachat de CREDIT SUISSE, Martin Hirzel et le patron du nouveau mastodonte bancaire Sergio Ermotti se confrontent sur la teneur de cette intégration pour la place financière et pour les entreprises en Suisse, dans un entretien croisé diffusé ce jeudi par la «NZZ»
Quelles répercussions l’acquisition de CREDIT SUISSE par UBS aura sur les entreprises suisses? Moins d’une année après le rachat du groupe bancaire, le patron d’UBS Sergio Ermotti et le président de Swissmem confronte leurs points de vue dans une interview publiée par la NZZ ce jeudi.
Pour Martin Hirzel, la présence de deux grandes banques internationales en Suisse a été avantageuse pour les entreprises suisses en termes de compétition et de relations bancaires. «Cette compétition a joué en notre faveur. De nombreuses entreprises entretiennent depuis longtemps de bonnes relations avec le CREDIT SUISSE, souvent perçu comme la banque la plus entrepreneuriale», estime le président de la faîtière de l’industrie des machines, équipements et métaux.
### Risque financier
Mardi, le gendarme des marchés financiers, la Finma, a dénoncé les «scandales à répétition» et les «erreurs» de gestion de
CREDIT SUISSE qui lui ont fait perdre la confiance des clients et conduit à son effondrement. Sergio Ermotti défend la nécessité de gérer les risques de manière responsable dans le secteur financier, suggérant que la culture du risque irresponsable a contribué au déclin du Crédit Suisse. «Le cœur de métier des banques est de gérer les risques et de les maîtriser. Cela implique d’absorber des pertes de temps en temps», estime-t-il.
Lire aussi: Avec CREDIT SUISSE, «on a atteint les limites de la surveillance bancaire»Dans un communiqué diffusé en début de mois,
UBS a précisé que la banque se préparait toujours à fusionner
UBS Switzerland AG et
CREDIT SUISSE (Schweiz) AG «en 2024». Ces deux entités regroupent leurs activités pour le marché suisse, englobant leurs banques de détails, les prêts hypothécaires et crédits aux entreprises suisses. La banque de détail et les activités de crédits aux entreprises locales ont longtemps été considérées comme le point fort de Credit Suisse.
«Le fait est qu’avant même l’acquisition de
CREDIT SUISSE, l’UBS détenait en Suisse une plus grande part de marché dans le commerce avec les PME suisses que
CREDIT SUISSE, souligne Sergio Ermotti. […] Nous étions et sommes toujours la plus grande banque de Suisse. Cette combinaison […] nous permettra d’offrir des services encore meilleurs», poursuit le patron d’UBS, affirmant ainsi engagement envers les entreprises suisses.
### «Pas de charité»
Mais les banques pourront-elles soutenir «indéfiniment des entreprises qui ne sont pas viables», interroge le quotidien alémanique? «Nous ne demandons pas à l’UBS de faire preuve de charité», lance Martin Hirzel, qui s’est auparavant dit «très reconnaissant de la promesse faite par Sergio Ermotti à la place industrielle suisse et aux PME».
La Finma, impliquée dans le sauvetage de
CREDIT SUISSE, a estimé que «les mesures de crise des autorités ont atteint leur objectif», mais que la base juridique en matière de surveillance du secteur bancaire «a atteint ses limites».
«Si l’on veut éviter une crise comme celle de
CREDIT SUISSE ou de certaines petites banques aux Etats-Unis, il faut une réglementation qui garantisse une gestion appropriée des risques. […], poursuit Sergio Ermotti. Personne ne souhaite que les banques réalisent des bénéfices, mais les bénéfices sont un bon indicateur.» «Nous avons donc intérêt à ce qu’UBS soit et reste une banque rentable», corrobore Martin Hirzel.
### Neutralité de la place financière
«Pendant des années, les politiciens ont laissé se détériorer les relations avec notre principal partenaire commercial et notre plus gros client, l’UE», déplore le patron de Swissmem. Interrogé sur la position géopolitique de la Confédération, Martin Hirzel souligne que la Suisse, en tant qu’économie ouverte, risque de se retrouver coincée entre deux fronts dans un environnement mondial détérioré.
La neutralité constitue-t-elle dès lors un avantage commercial? Pas en premier lieu si l’on en croit le patron de Swissmem. «Nos avantages concurrentiels ont toujours été en premier lieu la fiabilité, la qualité, la précision, la haute technologie, notre implantation et notre présence internationales. Et puis peut-être aussi le fait que nous n’avons pas la prétention de nous immiscer dans chaque conflit et de savoir mieux que les autres.» Du côté de la place financière, le fait que nous puissions, en Suisse, «jouer à armes égales avec les plus grands établissements financiers du monde, sans être une puissance géopolitique, est certainement un avantage», estime Sergio Ermotti.
**Notre dossier:** [La chute de Credit Suisse](https://www.letemps.ch/dossiers/la-chute-de-credit-suisse-nos-principaux-articles)