Autorisé mercredi par la FDA, le Zepbound, du laboratoire américain Eli Lilly, rejoint les médicaments à succès de Novo Nordisk contre l’obésité et le diabète, sur un secteur devenu majeur pour l’industrie pharmaceutique
L’agence américaine des médicaments (FDA) a annoncé avoir approuvé mercredi le Zepbound, un médicament du groupe américain Eli Lilly très attendu contre l’obésité. Le traitement est administré par injection une fois par semaine et devrait être disponible d’ici à la fin de l’année.
La molécule utilisée, nommée tirzépatide, était déjà approuvée contre le diabète depuis 2022 sous le nom de Mounjaro. Ce dernier médicament étant déjà prescrit par certains médecins hors des recommandations comme coupe-faim à de nombreux patients pour les aider à perdre du poids. La décision de la FDA de l’autoriser contre l’obésité «pourrait ouvrir la voie à une couverture d’assurance et à un plus grand nombre d’ordonnances» pour les personnes concernées, précise le New York Times. Le médicament est recommandé pour les personnes ayant un IMC (Indice de masse corporelle) de plus de 30, ou alors de plus de 27, mais souffrant de problèmes de santé liés à l’obésité, comme le diabète ou l’hypertension. Le quotidien notant au passage que cet indice est «très critiqué» et controversé.
Le Zepbound est très attendu depuis la publication des résultats d’un grand essai clinique, [cité par le _Washington Post_](https://www.washingtonpost.com/health/2023/11/08/mounjaro-zepbound-fda-approval-obesity/), montrant que le tirzépatide avait aidé «les participants en surpoids ou obèses à perdre au moins un quart de leur poids corporel, lorsqu’il était associé à un régime hypocalorique et à de l’exercice physique».
### Des médicaments qui «font fureur»
Cette perte de poids significative est le résultat clé mis en avant dans le communiqué des autorités sanitaires américaines, qui ajoutent que «l’obésité et le surpoids sont des problèmes de santé sérieux, qui peuvent être liés à certaines causes de décès majeures, comme des maladies cardiovasculaires, AVC ou du diabète». La FDA avertit également contre les effets secondaires possibles: nausée, vomissements, constipations, douleurs abdominales…
![Une image du médicament autorisé ce mercredi 8 novembre 2023. — © Eli Lilly via AP](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/e2653243-27a7-4cb8-ac84-0cad45647671 "Une image du médicament autorisé ce mercredi 8 novembre 2023. — © Eli Lilly via AP")
Mais ces effets ne semblent pas freiner l’enthousiasme du public et des investisseurs, observe le _Washington Post. «_Le tirzépatide fait partie d’une nouvelle génération de médicaments coupe-faim qui, malgré des effets secondaires parfois désagréables, font fureur auprès des célébrités hollywoodiennes et des personnes qui luttent depuis longtemps pour perdre du poids et ne pas le reprendre».
Le principe actif du Zepbound agit en imitant une hormone gastro-intestinale (GLP-1) qui active des récepteurs dans le cerveau jouant un rôle dans la régulation de l’appétit. Diana Thiara, directrice médicale du programme de gestion du poids de l’Université de Californie à San Francisco, citée par le _New York Times_, compare les effets du médicament à ceux observés avec un «anneau gastrique». Elle prévient toutefois que le médicament, «bien que révolutionnaire dans le traitement de l’obésité», ne devrait pas être utilisé «uniquement pour promouvoir une perte de poids extrême à court terme», mais combiné à une mise en place «d’habitudes alimentaires saines» et une adaptation d’un mode de vie comprenant de «l’exercice physique».
### La fortune de Novo Nordisk
Avant le Mounjaro et le Zepbound, les médicaments du groupe Novo Nordisk occupaient seuls ce secteur en pleine croissance. D’une part l’Ozempic, autorisé contre le diabète depuis 2017 aux Etats-Unis, et, d’autre part, son pendant contre l’obésité, commercialisé sous le nom de Wegovy et autorités depuis 2021.
Ces deux produits ont notamment provoqué l’engouement sur les réseaux sociaux pour leurs propriétés amaigrissantes, allant jusqu’à provoquer des ruptures de stocks. Et permettant au titre du groupe pharmaceutique danois qui les produit de s’envoler à la bourse, jusqu’à devenir la plus grande valorisation boursière en Europe devant
LVMH, à près de 450 milliards de dollars. Selon une analyse de JP Morgan, cette classe de médicaments représentera un marché à 140 milliards de dollars d’ici 2032. Et celui-ci restera largement dominé par Eli Lilly et Novo Nordisk.
Mais le succès des médicaments de Novo Nordisk et d’Eli Lilly «a incité d’autres entreprises à se lancer dans la prescription de médicaments amaigrissants, notamment WeightWatchers, aujourd’hui connu sous le nom de WW International», [indique CNN](https://www.cnn.com/politics/live-news/republican-debate-11-08-23/index.html). La société a ainsi annoncé en mars dernier le rachat de Sequence «un service d’abonnement […] qui met en relation les patients avec des médecins» prêts à prescrire Ozempic et Mounjaro.
La popularité de ces coupe-faim est telle qu’elle pourrait avoir un effet sur les résultats de l’industrie alimentaire, qui dépendent notamment d’une demande soutenue de _snacks_ et de chocolats aux Etats-Unis, selon certains analystes. Il y a quelques jours lors de la présentation des résultats de Nestlé, son directeur Mark Schneider, a ainsi révélé que le groupe veveysan travaillait sur des «aides à la santé destinées au nombre croissant de personnes utilisant ces médicaments», [selon _Forbes_](https://www.forbes.com/sites/roberthart/2023/10/19/nestl-is-developing-products-to-accompany-weight-loss-drugs-like-ozempic--amid-fears-theyll-eat-into-food-sales/?sh=564597334c45)_,_ citant «des produits tels que les compléments alimentaires pour soutenir la perte de poids et garantir que les gens obtiennent les vitamines, les minéraux et les autres nutriments dont ils ont besoin».
### Plus de 1000 dollars par moi
Autant dire que l’approbation «largement attendue» du Zepbound, dont le prix a été fixé par le laboratoire américain à 1060 dollars par mois, «est un moment décisif pour Eli Lilly», poursuit le _Washington Post,_ qui relève cependant s’il «offrira aux patients un nouvel outil puissant pour perdre du poids», «il obligera également les employeurs et les assureurs à prendre en charge les coûts d’un médicament onéreux que les patients devront peut-être prendre à long terme».
Ce prix, similaire à celui des autres traitements du même genre – et même 20% moins élevé que celui du Wegovy – pose également un problème d’accès pour les patients les moins fortunés, disposant d’une moins bonne, voire d’aucune couverture de santé.
D’autant plus que l’engouement autour de ces substances fait craindre que des personnes ayant les moyens, mais n’étant pas clairement en surpoids en fassent un usage détourné pour perdre quelques kilos. Pour celles-ci, les risques associés à ces médicaments ne sont pas contrebalancés par des bénéfices suffisants en termes de santé, contrairement aux personnes obèses. Aux Etats-Unis, ces dernières représentent tout de même environ 40% de la population adulte.