Comment un nouveau quartier d’affaires a vu le jour à GenèveDétenu à l’origine par les CFF, le site accueille désormais six bâtiments dédiés au tertiaire, avec quelques commerces et restaurants. Aujourd’hui, il ne reste plus qu’environ 14% de surfaces vacantes. Un succès Depuis le concours d’architecture lancé en 2012, remporté par le bureau lausannois Pont12, le vaste chantier du tout nouveau quartier d’affaires de Genève a eu le temps de démarrer (juin 2017) et de s’achever (en 2023). Dans l’intervalle, il a fallu démolir les anciens entrepôts et la tour des CFF, tandis que la gare Lancy-Pont-Rouge a été inaugurée en décembre 2019. Une nouvelle gare qui, rappelons-le, forme la colonne vertébrale de la nouvelle liaison du Léman Express (LEX). De quoi permettre à ce nouveau quartier, ainsi que celui de l’Adret situé à côté (640 logements), d’être à cinq minutes à peine de la gare Cornavin. Ce vaste chantier qui s’est déroulé en deux temps aura été le premier mené sur le fameux périmètre du PAV (couvrant la zone allant de la Praille aux Acacias, en passant par les Vernets, soit environ 230 hectares partagés entre les communes de Genève, Carouge et Lancy). C’est la première pièce de ce vaste puzzle de la Genève de 2050-2060. Pari risqué des CFFComme le disait Jürg Stöckli, responsable à l’époque de la division CFF Immobilier: «Les CFF ont pris des risques. Mais aujourd’hui, nous sommes fiers de jouer un rôle de pionnier en lançant ce projet d’envergure dans un périmètre en devenir.» SPG Partner avait remporté alors le mandat de la commercialisation de la première phase, soit les bâtiments Esplanade de Pont-Rouge 1 et 2, ainsi que Place de Pont-Rouge 1 et 2. Dès lors, son directeur général, Grégory Grobon, est bien placé pour analyser le travail fourni: «N’oublions pas que la mise sur le marché de plus de 110 000 m2 de surfaces de bureaux à l’échelle du canton de Genève, c’est énorme. Dès lors, en se retrouvant aujourd’hui avec globalement 14 000 m2 de surfaces encore disponibles, on peut considérer que l’opération Pont-Rouge aura remporté un franc succès. Cela a donné une bouffée d’oxygène au secteur.» La qualité des immeubles et de leur conception, avec la mise à disposition de plateaux pouvant aller jusqu’à 2000 m2, a très rapidement séduit les multinationales. A commencer par Crédit Agricole, KPMG, Swisscom, puis Cargill ou encore BNP Paribas. Ce sont des caractéristiques que l’on retrouve à Genève essentiellement dans la zone proche de l’aéroport. «Depuis le covid, les grosses entreprises peinent à faire revenir leurs employés dans les bureaux. Il est devenu plus compliqué de recruter aussi de jeunes talents si l’on ne se trouve pas hyper bien connecté et, si possible, au centre-ville», relève Grégory Grobon. Bref, il y a clairement une prime aux surfaces de bureaux situées en plein cœur de Genève et à ceux qui sont le mieux connectés avec les transports en commun, notamment. Quand le groupe Pictet s’est déplacé pour aller aux Acacias, certains cadres auraient ainsi quitté la société pour rester au centre-ville. De même pour Lombard Odier, qui a négocié avec les autorités pour bénéficier d’une bonne connexion ferroviaire, sans oublier la proximité de l’autoroute dans ce cas, ou encore la qualité de l’architecture. Rappelons que les nouveaux bâtiments de la banque privée représenteront la première œuvre du célèbre bureau Herzog & de Meuron, au bout du lac. Vingt pour cent de la demandeAvec les prochaines arrivées de la société Michael Page (aux 15e et 16e étages de la tour) et d’un magasin Coop au rez-de-chaussée, tous deux au sein d’Esplanade de Pont-Rouge 3, la success-story se confirme. Et chaque nouvel arrivant contribue à dynamiser le commerce local. Le take-up (la prise de bail dans une période donnée) de surfaces de bureaux à Genève est estimé à environ 100 000 m2 par année. Ainsi, Pont-Rouge aura à lui seul représenté environ 20% de cette demande pendant cinq années de suite. «C’est gigantesque», s’enthousiasme le directeur général de SPG Partner. Aujourd’hui, Genève présente un taux de surfaces de bureaux vacantes de 6%. «C’est très bien. En dessous de 5%, le marché serait sclérosé», relève Grégory Grobon. Cela étant, ce 6% n’est pas distribué de façon homogène. «Nous sommes plutôt aux alentours de 15% dans le secteur de l’aéroport et de 0% à la rue du Rhône. Une société ayant besoin de 2000 à 3000 m2 ne peut s’installer actuellement au centre-ville.» Futur Palais de justiceL’Etat de Genève a prévu d’implanter le futur Palais de justice à quelques centaines de mètres du site de Pont-Rouge, de quoi favoriser aussi la venue de plusieurs grandes études d’avocats dans ce périmètre: citons par exemple CMS von Erlach Partners, Baker McKenzie ou Oberson Abels. Cela étant, ce quartier extrêmement bien centré a très rapidement répondu à tous les critères de l’Ecole-club Migros. Cet institut de formation privé y a pris ses quartiers en septembre 2018. Il y a regroupé sur un même site ses deux centres préexistants. Onze millions de francs avaient été investis par la coopérative pour y aménager près de 50 salles de cours réparties sur six étages d’Esplanade 2, le premier «gratte-ciel» livré. Second exemple parlant: après l’achat en juillet 2020 par la Caisse de prévoyance de l’Etat de Genève (CPEG) du bâtiment construit par le groupe m3, l’Institution genevoise de maintien à domicile (IMAD) a fait le choix osé d’y installer son siège, mais aussi son campus de formation (dédié à ses 2400 collaborateurs). Avec l’adoption du flex office ainsi que du télétravail, l’IMAD a prévu 215 places de travail pour environ 350 collaborateurs travaillant quotidiennement à Pont-Rouge. Le spécialiste JLL a récemment relevé dans son étude sur le marché de bureaux genevois au 3e trimestre 2024 (dernière étude publiée) que le secteur du PAV avait vu son taux de vacance légèrement augmenté, à la fois par l’arrivée du projet Surville ( 2300 m2) et la prochaine libération de surfaces à Pont-Rouge, sans doute une allusion à la mise en faillite en 2024 de FlowBank. Rappelons que cette banque en ligne lancée en 2020 occupait près de 1900 m2 au 9e étage d’Alto Pont-Rouge avec ses 130 collaborateurs. Ce qu’il reste à faire pour que le succès soit totalA entendre divers spécialistes, il reste encore à réussir à animer ce quartier d’affaires. Un défi puisque l’espace public est privé, comme au Flon. Les copropriétaires veulent faire vivre l’esplanade centrale Chez Swiss Prime Site, propriétaire d’Alto Pont-Rouge, François-Xavier Favre, membre du Management TEAM, commente à son tour l’opération Pont-Rouge: «Le temps d’absorption moyen pour ce genre de surfaces de bureaux est de deux ans. Par rapport aux pratiques du marché, nous sommes donc dans la norme. Dès lors qu’il y a peu de nouveaux entrants sur le marché genevois, ce temps d’absorption est parfois plus long. A Zurich, c’est différent. Les nouvelles surfaces attirent aussi de nouvelles sociétés.» Manque de restaurantsL’arrivée récente de BNP PARIBAS à Pont-Rouge (800 salariés environ) a donné un coup de fouet aux quelques restaurants du quartier. A ce propos, des salariés désirant garder l’anonymat regrettent le manque d’établissements d’un certain niveau. Actuellement, le site comprend davantage de tea-rooms que de restaurants traditionnels. Il faut dire aussi que ceux qui ont souffert sont les premiers commerçants à s’y être installés, d’autant que l’apparition du covid a ensuite changé la donne. Mandaté récemment, Fabio Melcarne, directeur de la société de courtage immobilier du même nom, vient de signer avec un restaurateur libanais: «Au rez-de-chaussée du bâtiment de Swiss Life (Pont-Rouge 3), il va rester encore deux arcades pour d’autres restaurants. Il y a une réelle volonté de faire venir des enseignes de qualité supérieure. Cela étant, il faut reconnaître, qu’il n’est pas évident de ne tourner qu’avec le service de midi. D’autant que la clientèle ne consomme plus d’alcool au déjeuner.» Dès lors, il semble que les différents propriétaires du foncier font désormais preuve de davantage de souplesse dans la fixation des loyers. Il y aurait même parfois de la gratuité offerte pour contribuer aux travaux d’aménagement des commerçants. L’enjeu est de faire venir les passants et les salariés au cœur de ce nouveau quartier, là où seuls les piétons ont accès. Des activités sportives sont aussi visées pour une des arcades encore libres. Manque d’animationsSi le tout proche ensemble résidentiel de l’Adret semble avoir réussi à développer une vie de quartier, avec notamment un marché de Noël, cela n’est pas encore le cas à Pont-Rouge. Comme le relève l’architecte Marion Cruz Absi qui a étudié ce site, «dans l’ensemble, le quartier d’affaires ressemble davantage à une extension de la gare à ciel ouvert qu’à un nouveau centre urbain. Au rez-de-chaussée se trouvent davantage d’activités franchisées qu’en centre-ville, ainsi que des accès aux bâtiments réduits et opaques. Il existe aussi une différenciation au niveau de la matérialité du sol, créant une rupture visuelle avec l’Adret, à contre-pied des intentions premières d’un espace public connecteur entre les deux quartiers.» Rappelons au passage que, à l’image du quartier du Flon à Lausanne, détenu entièrement par Mobimo, le quartier de Pont-Rouge est lui aussi en mains privées. Son esplanade centrale est détenue par une copropriété formée par les propriétaires des quatre gratte-ciel: la Bâloise, Swiss Life, CPEG et Swiss Prime Site. D’après nos informations, ceux-ci sont justement en discussion pour amener de l’animation, par exemple avec un festival de food-truck, des concerts ou encore divers marchés. Cela dit, une chose est certaine, d’ici une décennie environ, lorsque les tours du CARREFOUR de l’Etoile (situé à quelques centaines de mètres) seront bâties, le quartier vivra nuit et jour. Samedi 12 avril 2025, 09h01 - LIRE LA SUITE ![]()
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