
Dans l’affaire des eaux filtrées, notamment Perrier, une jeune compagnie savoyarde, Bonneval, attaque Nestlé pour concurrence déloyale. Elle l’accuse d’avoir «indûment» profité de l’appellation «eau minérale naturelle»
Les soucis de la division Eaux de Nestlé s’aggravent, cette fois sur le terrain du droit de la concurrence. Dans le cadre de l’affaire des eaux filtrées – en particulier Perrier –, Le Monde indique ce mercredi que Bonneval Emergence (propriétaire des marques Bonneval, ROCHE Claire et Joséphine) attaque le groupe basé à Vevey pour «concurrence déloyale». L’argument est simple: si Nestlé a utilisé «indûment» l’appellation «eau minérale naturelle», elle a bénéficié d’un avantage concurrentiel injustifié. Bonneval demande le retrait du marché français des labels Perrier, Vittel, Contrex et Hépar.
Bonneval est une jeune société fondée en 2017, sise en Savoie. Elle se vante d’y exploiter deux sources en haute altitude sans forage et sans procédé prohibé. Sur le marché, c’est un nain: en 2025, elle a vendu en France 8 millions de bouteilles, où s’achètent chaque année quelque 10 milliards de flacons.
Le recours à des filtres à charbons actifs
Nestlé a admis avoir utilisé pendant des années des traitements interdits, par exemple des filtres à charbons actifs, des UV et de la microfiltration. Le Monde et FranceInfo, qui ont révélé l’affaire, ont indiqué encore début décembre qu’environ quatre millions de bouteilles de Perrier sont bloquées par les autorités sanitaires après de mauvaises analyses sur le site de Vergèze, dans le Gard.
La radio publique a signalé que «Nestlé continue de produire la marque Perrier avec une eau régulièrement contaminée, filtrée par des microfiltres de 0,45 micron destinés à retenir certaines bactéries, mais insuffisants à garantir la sécurité sanitaire de l’eau. Et ce en dehors de tout cadre réglementaire. En effet, tout traitement doit avoir été préalablement autorisé par le préfet. Or, Nestlé ne dispose à ce jour d’aucune autorisation préfectorale à jour pour ce type de filtres.»
Selon Nestlé, «des motifs totalement infondés»
A ce sujet, le patron de Bonneval David Merle affirme qu’«autoriser la filtration à 0,45 micron serait une ineptie, ce serait accepter que l’appellation eau minérale naturelle disparaisse et brader un patrimoine national pour effacer les pratiques d’une multinationale étrangère».
La petite société brandit les résultats de ses calculs. Elle estime qu’elle aurait pu écouler 50% de volume en plus si les bouteilles de Vittel, Contrex, Hépar et surtout Perrier n’avaient été vendus de manière «illicite» ces quatre années. Elle chiffre le préjudice à 1,6 milliard d’euros. Elle demande surtout le retrait de ces marques, car selon ses avocats, «il s’agit de casser un système qui consiste à changer les règles et non les pratiques illicites».
Bonneval a assigné Nestlé Waters devant le tribunal des activités économiques de Nanterre. Une première audience est prévue le 27 janvier. Le groupe veveysan a «pris acte de cette assignation déposée sur des motifs totalement infondés», et il compte «défendre vigoureusement sa position».