COMBourse - Analyse graphique de l'actualite, des actions et des societes
 
CREER VOTRE COMPTE
Source : LeTemps.ch  (il y a 6 mois)

«Les économistes nourrissent l’inaction des politiques sur le climat»

Les climatologues décrivent des conséquences cataclysmiques si le réchauffement climatique dépasse 3 degrés, mais les banques centrales et les régulateurs financiers estiment que les pertes financières seront supportables, dénonce Thierry Philipponnat de l’ONG Finance Watch

Ce samedi 4 novembre marquera le septième anniversaire de l’Accord de Paris, qui vise à maintenir l’augmentation de la température moyenne du globe en dessous de 2 degrés par rapport à l’époque préindustrielle. Dans un rapport publié le 31 octobre, l’ONG Finance Watch affirme que les économistes, même les plus sérieux, sous-estiment l’impact du réchauffement climatique sur l’économie. Et propose un nouvel outil pour limiter le risque lié au financement des énergies fossiles. Les explications de Thierry Philipponnat, économiste en chef de cette ONG qui se veut un contrepoids au lobby de l’industrie financière.

Lire aussi: La finance durable vue par les activistes
**Le Temps: Sur quoi vous basez-vous pour affirmer que les pouvoirs publics sous-estiment l’impact du changement climatique?** **Thierry Philipponnat:** Essentiellement sur les différences entre le résultat du travail des climatologues et le résultat du travail des économistes. Les climatologues nous disent par exemple qu’au-delà de 3 degrés de réchauffement, nous sommes à un niveau qui est au-delà du catastrophique. Sur la tendance actuelle, au-delà de 2 à 2,5 degrés, entre 3,3 et 3,6 milliards d’êtres humains – soit 40% de l’humanité – vivront dans des zones inhabitables à cause du changement climatique. Nous avons déjà atteint 1,5 degré, selon l’Organisation météorologique mondiale, et au rythme actuel des émissions de CO2, nous serons à 2 degrés en 2050 et à 3 degrés à la fin du siècle. Les climatologues nous disent donc que nous faisons face à une perturbation du fonctionnement des sociétés humaines et donc de l’économie, du fait du réchauffement climatique.
Lire aussi: Financer la transition climatique des pays émergents
**Et les économistes?** William Nordhaus, Prix Nobel d’économie 2018, affirme pour sa part que le réchauffement climatique optimal se situe à 3 degrés. Ça laisse sans voix. Autre exemple: un organisme très sérieux et rempli de gens très compétents comme le NGFS, le Network for Greening the Financial System. Ce réseau de 127 banques centrales et superviseurs financiers utilise une méthodologie qui estime qu’avec un réchauffement de 3,5 degrés le PIB mondial baissera entre 7 et 14%. Sachant qu’on se situera alors en 2100 et que le PIB mondial aura été multiplié par 2,5 ou 3 d’ici-là, cela donne l’impression que l’impact ne sera pas catastrophique, que l’activité économique pourra continuer. Enfin, le Financial Stability Forum, qui supervise la surveillance du secteur financier au niveau mondial, affirme qu’à 4 degrés l’impact sur les marchés financiers serait une baisse comprise entre 3 et 10%. L’équivalent de deux ou trois mauvais jours de bourse! Le simple bon sens nous fait comprendre qu’on ne peut pas avoir des discours aussi différents entre climatologues et économistes.
Lire aussi: Face au réchauffement climatique, la finance choisit la poudre aux yeux
**Comment expliquez-vous un tel décalage?** Par des causes techniques, tout d’abord. Les modèles utilisés par les économistes ne sont pas capables de capturer les spécificités du changement climatique, notamment les phénomènes d’accélération autour des points de bascule. Ensuite, les hypothèses utilisées par les économistes ne prennent pas en compte le monde tel qu’on l’anticipe avec le changement climatique. Concrètement, le NGFS n’intègre pas dans ses réflexions le potentiel déplacement d’êtres humains ni la hausse possible du niveau des océans à cause du changement climatique. **Et donc, leurs résultats sont faux?** Non, c’est la conséquence des hypothèses limitatives que ces organismes utilisent. En outre, ils savent très bien que leurs résultats ne sont pas parfaits, et l’écrivent noir sur blanc. Le problème est que les décideurs politiques, et c’est vrai dans tous les pays, ne lisent pas les rapports de plusieurs centaines de pages, mais seulement leurs conclusions. En sous-estimant l’impact économique du changement climatique, les économistes nourrissent l’inaction des politiques.
Lire aussi: Le climat pèsera sur les budgets publics
**Comment prendre en compte ces pertes que votre rapport décrit comme étant «imprévisibles, permanentes et d’ampleur disruptive»?** Il faudrait se baser sur les travaux des climatologues, pas ceux des économistes, qui raisonnent en termes de probabilités et qui travaillent avec des données incomplètes. **Votre rapport recommande également de mettre en place de nouvelles exigences de capital pour les intermédiaires financiers qui financent les énergies fossiles. De quoi s’agit-il?** Aujourd’hui, si l’on veut limiter le réchauffement à 2 degrés, il faut laisser dans le sol 77% des réserves d’hydrocarbures. C’est ce qu’on appelle les actifs échoués, dont la valeur va tomber à zéro [«stranded assets», en jargon financier, ndlr]. Cela laisse 23% des réserves prouvées qui peuvent être exploitées. Le régulateur pourrait considérer que si une banque finance des actifs qui ne pourront pas être exploités – les 77% qui doivent rester dans le sol –, elle prend un risque considérable. **Pourquoi?** Quel que soit le scénario, ces actifs ne vaudront plus rien, soit parce que les dirigeants du monde entier décideront d’arrêter d’exploiter les énergies fossiles, soit – et c’est plus probable – le réchauffement climatique de 3, 4 ou 5 degrés sera tellement catastrophique que la valeur de tous les actifs économiques et financiers s’effondrera. Face à un tel risque, les régulateurs devraient imposer la même pratique que celle qui existe déjà sur le marché immobilier. **Comment?** Soit en imposant aux banques des exigences en capital supérieures pour la fraction des prêts accordés qui dépasse les 23% d’actifs fossiles exploitables, soit en interdisant les financements au-delà de ce seuil. Le but est d’éviter une nouvelle crise financière qui s’ajoute à la crise climatique.
Lire aussi: Les acteurs financiers comptent faire partie de la solution au réchauffement climatique
**Le système bancaire finance-t-il trop les énergies fossiles?** Nous avons calculé que l’ensemble des prêts accordés par le système bancaire aux sociétés actives dans le pétrole, le gaz et le charbon représente 437% de la valeur exploitable des énergies fossiles, c’est-à-dire la valeur des 23% de réserves qui sont compatibles avec un réchauffement de 2 degrés. Dans l’immobilier, on estime qu’il est prudent de ne pas financer plus de 80% de la valeur d’un bien. Mais dans les énergies fossiles, on se trouve dans une disproportion complète entre les engagements financiers et la valeur économique sous-jacente. C’est une recette pour une catastrophe, parce qu’un jour la réalité économique va parler.

Jeudi 02 novembre 2023, 20h31 - LIRE LA SUITE
Partager : 
16h04

Les projections et prospectives des banques centrales nourrissent des critiques

05h02

Émissions de CO2: accusé d'inaction, Shell à nouveau devant la justice

01h04

Inaction climatique

09h05

Le poker en ligne et les paris sportifs nourrissent la dynamique de la FDJ

09h02

Les médicaments GLP-1 secouent le marché pharma et nourrissent les investissements industriels

15h02

L’inaction climatique pourrait coûter près de 235 milliards d’euros

20h31

«Les économistes nourrissent l’inaction des politiques sur le climat»

15h01

Inaction climatique: Des ONG demandent 1 milliard d'euros d'astreinte à la France

09h01

Inaction climatique : TotalEnergies à nouveau sur la sellette

05h01

TotalEnergies au tribunal face aux ONG et aux collectivités qui l'accusent d'"inaction climatique"

21h01

La France se prépare à une hausse des températures de 4°C : un prétexte à l’inaction climatique ?

20h02

La France se prépare à une hausse des températures de 4°C : un prétexte à l’inaction contre le climat ?








Jean-Charles Naimi est décédé 15 avril
Agefi.fr
Boeing : quelles compagnies possèdent le plus d’avions dans le viseur du régulateur américain? 20 avril
Lefigaro.fr
Biogaran racheté par un Indien, le scenario cauchemar du secteur des génériques 17 avril
Lesechos.fr
«Je n'ai aucune réservation» : à 100 jours des JO, la désillusion des hôteliers et propriétaires d’Airbnb 17 avril
Lefigaro.fr
La fusion de Crelan et Axa Bank entraînera la suppression de 150 emplois "à long terme" 23 avril
rtlinfo.be
DPAM, Candriam et UBS sont les marques les plus « responsables » 16 avril
Agefi.fr
Pourquoi Nestlé a perdu la confiance des investisseurs 16 avril
LeTemps.ch
Duel Alstom-Siemens pour le futur TGV de Californie 19 avril
Lesechos.fr
«Dogs fly first» : une nouvelle compagnie aérienne propose de faire voyager les chiens en cabine avec leurs propriétaires 16 avril
Lefigaro.fr
Clash au sommet de la Compagnie du Zoute 11 mai
Lalibre.be
Perrier, la descente aux enfers du «champagne des eaux de table» 05 mai
Lefigaro.fr
«Je n’ai plus de soucis à me faire» : comment Alexandre, 55 ans, s’est assuré un revenu de 7500 euros par mois à la retraite 26 avril
Lefigaro.fr
«Rentrez chez vous!»: en proie au surtourisme, l’Espagne multiplie les mesures pour limiter les visiteurs 17 avril
LeTemps.ch
Marc Bertrand devrait remplacer Grégory Frapet chez Primonial REIM France 16 avril
Agefi.fr
La longue et douloureuse chute d’Arnaud Lagardère 30 avril
LePoint.fr