COMBourse - Analyse graphique de l'actualite, des actions et des societes
 
CREER VOTRE COMPTE
Source : LeTemps.ch  (il y a 3 mois)

La Suisse AFFINE, le Sénégal s'efface

DE KÉDOUGOU À MARIN, SUR LES TRACES DE L'OR SÉNÉGALAIS (2/2). C’est dans une zone industrielle d’une petite ville neuchâteloise que l’or extrait à Sabodala, au Sénégal, est affiné depuis des années. Le directeur de Metalor ouvre ses portes et répond aux interrogations des mineurs. Second volet de notre reportage

En quittant la gare de Marin-Epagnier, aux confins du lac de Neuchâtel, il faut traverser les voies de chemin de fer, longer un champ agricole, puis un parking et c’est là. Là? Là que se dresse l’usine d’affinage Metalor Technologies, la destination des 11 tonnes d’or de la mine de Sabodala-Endeavour. C’est là, dans cette zone industrielle sous son ciel gris de mi-novembre avec ses supermarchés du meuble ou de l’électronique, que 60% des exportations sénégalaises du précieux minerai sont transformés en or fin. Alors qu’à Kédougou, la région au sud-est du pays d’où on l’extrait, la population s’interroge sur la destination de «son» or, à Marin on vous dira qu’il n’y a rien de secret. Il suffit de frapper à la bonne porte.

Une porte très sécurisée. Après un tourniquet pour pénétrer dans l’enceinte de Metalor, vous devrez déposer à l’entrée du bâtiment vos objets électroniques et passer par un premier détecteur à métaux. Il faut ensuite changer de tenue, de chaussures, s’équiper de lunettes de protection et de bouchons d’oreilles et traverser un second détecteur pour accéder aux ateliers sous l’œil des caméras. «Notre volonté est de mieux faire comprendre notre métier et de répondre aux questions en toute transparence», explique son directeur, Antoine de Montmollin. Dans une première salle des dépôts, notre guide indique une plaque de doré minier de Sabodala sur l’une des étagères où s’entassent avant tout des «déchets» d’or industriel recyclé. «La clé du succès d’un affineur est d’évaluer correctement la valeur de l’or, que ce soit du doré minier ou des déchets industriels. La prise de risque en la matière constitue un élément de notre savoir-faire.» ![Antoine de Montmollin, directeur de Metalor. — © Matthieu Spohn pour Le Temps](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/8c65537f-2c61-494a-a7f9-c0217350b5e6 "Antoine de Montmollin, directeur de Metalor. — © Matthieu Spohn pour Le Temps") ### De la simple chimie Le doré minier de Sabodala est composé à 89,6% d’or et 6% d’argent, un titre élevé. Il est désamalgamé dans un énorme cylindre. «C’est de la simple chimie, indique le directeur. Une fois purifié à 99,99%, on ne peut plus déterminer sa provenance.» L’or sénégalais est alors mélangé avec d’«autres sources d’approvisionnement» pour être fondu en grenaille, pour le secteur horloger, bijoutier et l’industrie électronique, ou en lingots standard de 12,4 kg qui partent vers des banques, «à Londres, en Suisse ou ailleurs». Metalor AFFINE environ 300 tonnes d’or fin par an. «La quantité d’or de Sabodala est relativement modeste, constate Antoine de Montmollin. C’est un 10e de jour de travail en tout.» Ce travail ne pourrait-il pas être réalisé à Kédougou ou à Dakar, comme le suggère le Club des investisseurs sénégalais? «Nous recevons de nombreuses demandes d’Etats africains. Mais les volumes ne sont tout simplement pas assez importants pour que cela soit rentable.» Autres problèmes: La sécurité et les services bancaires. Et puis, il y a la stabilité politique et le risque de nationalisation. «Il faut être franc, pour la plupart des pays africains, ce n’est pas envisageable», tranche le directeur. ![Grenaille d'or. — © Matthieu Spohn pour Le Temps](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/ecbb11c2-6bf5-4564-aa96-e817a08edde7 "Grenaille d'or. — © Matthieu Spohn pour Le Temps") D’ailleurs, aucune sollicitation n’est venue du Sénégal. Des Ghanéens, premiers producteurs d’or en Afrique, visiteront par contre Marin en janvier prochain. Le secteur semble en ébullition. Fin novembre, le Burkina Faso annonçait la construction d’une usine d’affinage. Quelques jours plus tôt, c’étaient les autorités maliennes qui signaient un accord avec la Russie pour développer à Bamako une raffinerie d’une capacité de 200 tonnes d’or par an. Une prise de contrôle des ressources au profit des populations, affirment les autorités putschistes de ces pays. ### L’Afrique n’apparaît pas comme source L’or, son commerce et ses marges, véhicule des fantasmes. Qu’en est-il de l’affinage? Si un kilo d’or 99,99 vaut près de 60 000 francs, le prix d’affinage d’un kilo d’or minier ne coûte «que» de 30 francs. Ce qui représente «environ 320 000 francs» pour le traitement des onze tonnes de Sabodala. L’or purifié que l’on voit dans l’usine n’appartient pas à Metalor. Entre l’achat de l’or minier et la vente de l’or affiné, il ne se passe que quelques jours. «Notre métier consiste à affiner, pas à spéculer. Le gain de trading est marginal», précise le directeur en évoquant un chiffre d’affaires de 360 millions de francs par an. L’affinage de l’or représente 75% de l’activité. Selon [un rapport de l’ONG Swissaid](https://www.swissaid.ch/fr/medias/swissaid-fait-la-lumiere-sur-le-commerce-de-lor-industriel-africain/#) publié en début d’année sur «Les relations d’affaires entre les mines d’or industrielles en Afrique et les raffineries», Metalor AFFINE l’or de 11 pays africains provenant de 26 mines. Le groupe, qui compte 1500 employés dans le monde dont 300 à Marin, est détenu par un actionnaire unique, [l’entreprise familiale japonaise Tanaka](https://metalor.com). Son chiffre d’affaires est réalisé pour moitié en Europe, un quart en Asie et un quart aux Amériques. Et l’Afrique? Elle n’apparaît pas. Les multinationales qui vendent le minerai à Metalor ont leur siège en Europe, au Canada ou aux Etats-Unis. Jamais en Afrique. Endeavour, l’entreprise anglo-canadienne qui extrait le minerai de Sabodala, est à Londres. «Nous voulions pointer du doigt l’opacité des entreprises d’affinage, explique Marc Ummel, responsable matière première chez Swissaid. Metalor a été assez ouvert à nos demandes et Endeavour s’est montré transparent sur certaines choses. Il y a aussi des problèmes.» Lesquels? Pollution, fiscalité, redistribution, les mines industrielles sont souvent des zones de non-droit. «En définitive, il faut bien constater que dans la région où l’on extrait ces 11 tonnes d’or, les villages vivent dans la misère.» ### «Tout est nébuleux dans les chiffres» Résumons: l’or de Sabodala est exploité par une entreprise étrangère (Endeavour), affiné à l’étranger (Metalor) et vendu à des banques étrangères. A Kédougou, les populations s’interrogent sur l’impact de cette extraction industrielle et déplorent le manque d’emplois créés. Cet or n’enrichit-il pas du moins l’Etat sénégalais? Dans un document daté de 2022 transmis au _Temps_, [Endeavour](https://www.endeavourmining.com) indique des «contributions totales» pour le Sénégal qui s’élèvent à 434 millions de dollars en 2021 ou 1,6% du PIB national. Soit 294 millions de dépenses locales (_procurement_), 97 millions d’impôts et 43 millions en salaires. L’entreprise respecte le [Responsible Gold Mining Principles](https://www.gold.org/industry-standards/responsible-gold-mining) («RGMPs»), un code de conduite édicté en 2019 par le [Conseil mondial de l’or](https://www.gold.org) ainsi que le code minier sénégalais. Celui-ci prévoit que 0,5% du revenu hors taxes de l’entreprise doit être reversé à un Fonds de développement local, soit 3,3 millions de dollars en 2021. Dans le cadre de ce fonds, Endeavour affirme investir dans la santé et l’éducation de 17 villages. L’entreprise finance aussi un projet de protection des chimpanzés. ![Village de mineurs de Sabodala. Région de Kédougou, Sénégal, octobre 2023. — © Frédéric Koller](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/7ee1bb8f-c7b8-4b43-bfb8-0402664d0366 "Village de mineurs de Sabodala. Région de Kédougou, Sénégal, octobre 2023. — © Frédéric Koller") Retour à Dakar, début octobre 2023. Une fois extrait du dédale des rues de la médina, le taxi nous dépose au numéro 40 de l’avenue El Hadji Malick Sy, proche du Palais de justice. Nous avons rendez-vous avec Birahim Seck, président du Forum civique, la section locale de Transparency International. «Tout est nébuleux dans les chiffres de l’industrie minière. Qui extrait, qui exploite, qui verse quoi à qui? Les chiffres ne sont pas fiables», explique-t-il en ouvrant son ordinateur. L’administration ne serait tout simplement «pas outillée» pour faire face aux industries. «Elle n’a ni les moyens, ni la volonté de faire la lumière sur l’activité minière.» ![Birahim Seck, président du Forum civique, la section locale de Transparency International. Dakar, Sénégal, octobre 2023. — © Frédéric Koller/Le Temps](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/2e3ab8d6-e761-4858-a108-50a7c0461612 "Birahim Seck, président du Forum civique, la section locale de Transparency International. Dakar, Sénégal, octobre 2023. — © Frédéric Koller/Le Temps") La loi est pourtant claire: le bénéfice des sociétés minières est imposé à 30%, à quoi s’ajoute l’impôt sur le revenu des personnes et les fameux 0,5% de taxe pour un fonds local. «C’est l’article 115 du Code minier, poursuit Birahim Seck. Mais cet argent n’est pas recouvré. Certains maires ne sont même pas au courant.» Les droits des communautés seraient ainsi violés. «Pourquoi le Ministère des mines ne fait rien? Pourquoi les localités ne bougent pas? C’est évident, non?» Au dernier classement de Transparency International sur la corruption, le Sénégal pointe au 72e rang mondial (sur 180). Il est dans la zone rouge depuis 2016. «La mal gouvernance s’accentue», conclut l’activiste. ### «Comme un système d’esclavage» Quelques jours plus tôt, au bar d’un grand hôtel de Dakar, Moustapha Guirassy tenait à peu près le même discours. Il n’est pas un militant, mais l’ancien maire de Kédougou, un ex-ministre et candidat à l’élection présidentielle. Il décrit l’attitude des sociétés d’extraction ainsi: «Je vous offre une ambulance, mais je prends votre jeunesse et vos richesses. Ces mines sont d’un luxe extraordinaire, on en sort et on voit la pauvreté partout.» Il a vu les entreprises s’installer, les révoltes dès 2008, la police tirer à balle réelle sur les manifestants. «Les populations sont livrées à elles-mêmes. Les jeunes disent que c’est comme un système d’esclavage.» Lorsqu’il était maire, Moustapha Guirassy ne «faisait pas le poids». «Je reproche aux entreprises minières leur complicité avec les représentants de l’Etat au plus haut niveau, à Dakar.» Au sommet de l’Etat, on pointe du doigt la responsabilité des sociétés. «Les entreprises minières doivent comprendre qu’il est inacceptable de les voir prospérer alors que les communautés environnantes s’appauvrissent», expliquait début octobre le premier ministre Amadou Ba lors du 7e Salon international des mines à Dakar. La ministre d’Etat, Awa Marie Coll Seck, convient toutefois que c’est aussi aux autorités de changer (lire ci-dessous). ### Besoin d’un or éthique Dans une autre vie, Antoine de Montmollin était délégué du CICR. Il connaît l’Afrique où il a été déployé au Zimbabwe. «Il est important d’effectuer régulièrement des visites sur place pour nous assurer, également à notre niveau, du respect des droits de l’homme et de la protection de l’environnement», dit-il. Chaque année, un employé de Metalor vérifie les conditions d’exploitation à Sabodala où il dort dans le camp des travailleurs. Selon le directeur, Endeavour a une bonne réputation. L’or est transporté par un jet privé jusqu’à Dakar, puis par avion de ligne vers Zurich, via Paris. «Il est soumis à tous les contrôles douaniers», ajoute-t-il en s’étonnant des rumeurs qui, au Sénégal, font état d’avions quittant la mine directement pour l’Europe. Metalor se dit à l’écoute de la société civile et désireuse d’entendre des témoignages du terrain, raison pour laquelle l’entreprise a ouvert ses portes. ![L'entreprise Metalor a décidé de se passer de l'or issu du minage artisanal. — © Matthieu Spohn pour Le Temps](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/5b0fe29d-9c57-4608-9aed-e7e23a1c5278 "L'entreprise Metalor a décidé de se passer de l'or issu du minage artisanal. — © Matthieu Spohn pour Le Temps") Dans le même temps, le secteur du luxe ne veut pas entendre parler d’or africain. «On sent une volonté de promouvoir un or éthique», poursuit Antoine de Montmollin. Les horlogers veulent être propres. Après le scandale des diamants du sang, les conditions d’extraction de l’or font l’objet d’une suspicion. C’est la raison pour laquelle Metalor ne travaille plus avec des prospecteurs d’or traditionnels depuis 2014, en Afrique ou ailleurs. Or, il faut bien le reconnaître: «Pour créer de l’emploi, la première étape serait de légaliser les orpailleurs artisanaux et de les payer au juste prix, celui du marché», estime le directeur. La Suisse abrite quatre des plus importantes sociétés affiliées à la London Bullion Market Association (LBMA), la faîtière du commerce aurifère dont les standards garantissent un approvisionnement responsable. Selon l’Association suisse des fabricants et commerçants de métaux précieux (ASFCMP), la production d’or primaire (issu des mines) est évaluée à 3000 tonnes par an dont «15 à 20%» sont affinés en Suisse. Selon plusieurs ONG, pas moins de 70% de l’or mondial est négocié ou affiné en Suisse. Une prédominance qui s’expliquerait par un cadre législatif moins contraignant en matière de transparence que les normes de l’OCDE. Le 15 novembre dernier, lors d’une rare délibération publique, le Tribunal fédéral déboutait ainsi la Société pour les peuples menacés, une ONG qui demandait la divulgation de l’identité des fournisseurs des affineries. Une requête rejetée au nom du secret fiscal. Le secteur se dit pourtant favorable à un alignement de la Suisse sur les normes internationales. Le parlement devrait se prononcer à ce sujet au printemps prochain.

La London Bullion Market Association

La LBMA regroupe 77 membres sur le marché des métaux précieux de Londres, place de référence pour le commerce de l’or et de l’argent. Il s’agit d’une organisation professionnelle qui supervise les marchés de gros. Parmi ses activités, il y a la vente, le trading, la livraison, le stockage ou l’extraction minière. Pour y adhérer, les candidats doivent être sponsorisés par trois membres avec lesquels ils sont en relations d’affaires dans les secteurs des métaux précieux depuis douze ans. Parmi les membres suisses, on compte UBS pour le secteur financier et les quatre plus grands affineurs du pays dont Metalor.


Lire aussi: Sur les importations d’or, le Tribunal fédéral privilégie le secret fiscal à la transparence
A l’origine de ce périple sur les traces de l’or sénégalais, il y avait Atepa, le concepteur du Monument de la Renaissance africaine, l’une des plus grandes statues au monde. De passage à Genève, en septembre dernier, l’architecte avait interpellé la Suisse et ses parlementaires: Pourquoi l’or du Sénégal part-il en Suisse sans profiter aux Sénégalais? Comment se fait-il que «les hommes qui travaillent dans l’or vivent dans les ordures» ? Il avait déjà sa réponse: la corruption. Et pour qu’il y ait un corrompu, il faut un corrupteur. «La responsabilité incombe d’abords aux dirigeants sénégalais. Mais c’est avec la complicité des Européens. L’Afrique compte sur une nouvelle génération pour un nouveau deal», expliquait-il en octobre dernier lorsque nous l’avions retrouvé dans ses bureaux à Dakar. Le commerce de l’or de Kédougou est en définitive à l’image du commerce des ressources de tout un continent. Tout reste à faire pour qu’elles profitent enfin aux Africains. * * * ## Awa Marie Coll Seck: «Il faut revoir les contrats» La ministre d’Etat sénégalaise et présidente du comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) répond aux questions du _Temps_. ![Awa Marie Coll Seck, ministre d’Etat sénégalaise et présidente du comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). — © Herve Cortinat/OECD](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/605ab765-f03e-4acb-b978-0008e01181d4 "Awa Marie Coll Seck, ministre d’Etat sénégalaise et présidente du comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). — © Herve Cortinat/OECD ") **Le Temps: La filière de l’or est-elle problématique?** **Awa Marie Coll Seck** : Des gens trouvaient parfois des pépites de manière artisanale. On s’est rendu compte qu’il fallait industrialiser son extraction. On a ouvert les portes aux entreprises extractives. Seules les entreprises étrangères ont répondu car les investissements étaient conséquents. Elles ont été invitées. Puis, les gens ont commencé à dire que ces grandes entreprises venaient prendre toutes nos richesses. Pour les attirer en Afrique, elles ont bénéficié de larges exemptions. Elles payent peu de taxes. **Combien?** Notre rapport annuel conclut que tout ce qui relève de l’industrie extractive, l’or, le phosphate et autres, n’apporte pas plus de 4% du budget national. C’est peu. **Que faut-il changer?** Une loi dite du contenu local a été votée. Les entreprises non seulement payaient peu de taxes, mais elles vivaient en vase clos et achetaient tout dans leur pays d’origine. Dans une mine australienne du Kédougou, même l’eau minérale était importée d’Australie, les fruits, les poulets, tout venait par cargo. A présent, elle doit faire un appel d’offres pour les producteurs sénégalais. Vous ne pouvez pas tout rapatrier. Tous vos bénéfices retournent chez vous et vous ne consommez rien de local? Les populations doivent bénéficier de la présence de ces industries. On commence à voir les effets de cette loi. Des femmes ont créé des coopératives de production pour vendre leurs poulets. Elles se transforment en producteurs. **Combien de mineurs emploient ces mines industrielles?** Elles sont peu pourvoyeuses d’emplois. J’ai été surprise de voir de grandes mines embaucher 500 personnes. Les gens ne voient pas la différence en fonction de si elles sont là ou pas. On dit que votre zone est riche, mais on ne voit pas l’or. Il y a même un appauvrissement. Cela crée une animosité envers les grandes entreprises. **Et les orpailleurs traditionnels?** On a un système de communauté. Mais il n’y a pas que des gens de la région, ils viennent de partout, il y a des Guinéens, des Burkinabés, des Maliens, et on se demande qu’est-ce qu’ils font là. Les gens commencent presque à être racistes. Mais c’est un moindre problème en Afrique car il y a moins d’argent. **Que pensez-vous du fait que 60% de l’or sénégalais part en Suisse?** C’est à nous de nous organiser. Si le bijoutier sénégalais doit acheter l’or en Suisse, on doit alors imposer qu’une partie au moins de l’or extrait au Sénégal passe par des comptoirs sénégalais. Même l’or clandestin va au Mali. Il faut revoir les contrats. Ce sont des négociations. Il y a des améliorations réglementaires, commerciales et financières à réaliser. **C’est donc à l’Etat sénégalais d’agir?** Oui. Il faut que cela change. Mais sans faire la révolution. * * * ### Macky Sall: «Si les entreprises payaient le juste impôt…» De passage au siège de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), à Genève, mi-décembre, le président sénégalais fustige les «congés fiscaux». ![Macky Sall, président du Sénégal, à Dubaï, le 1er décembre 2023, lors de la COP28. — © KARIM SAHIB / AFP](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/7534342d-6042-4322-b169-0f26b2b51c13 "Macky Sall, président du Sénégal, à Dubaï, le 1er décembre 2023, lors de la COP28. — © KARIM SAHIB / AFP") «Si les entreprises payaient le juste impôt cela représenterait plus que toute l’aide au développement. Nous n’aurions plus besoin de soutien public.» Au siège de l’OMC, à Genève, Macky Sall soulignait mi-décembre le manque à gagner des Etats africains en raison d’une fiscalité défaillante. Quel est le problème? Les congés fiscaux. Ces rabais d’impôts octroyés aux entreprises d’extraction en particulier au nom d’une «certaine conception du libéralisme». «Il y a des congés fiscaux pour le temps de l’exploration et pour la période de production. Il faut revoir les codes miniers.» «L’évasion fiscale est un énorme problème. Nous, Etats africains, avons beaucoup de devoirs à faire à la maison, a complété Ngozi Okonjo-Iweala, la directrice nigériane de l’OMC. Les flux financiers illicites hors du continent s’élèvent à 50 milliards de dollars. C’est l’équivalent de l’aide totale à l’Afrique.» Même constat dans la bouche de la première ministre namibienne, Saara Kuugongelwa-Amadhila: «La responsabilité première incombe à nos Etats. Nous devons revoirs nos taxes et les exigences pour soutenir l’emploi local.» Macky Sall salue l'«accord historique» de l’OCDE pour fixer un «impôt minimal mondial» de 15% sur les entreprises. «Si cela s’appliquait dans nos pays, ce serait déjà énorme. Le commerce ne peut être durable quand, par des pratiques d’évasion ou de congés fiscaux abusifs, l’impôt n’est pas payé là où la richesse est créée.» Minerais, pétrole, gaz, l’heure est à la «transformation sur place» et non plus à l’exportation des ressources brutes. Pour cela, il faut un meilleur accès aux marchés financiers. Dernière cible du président sénégalais: les agences de notation. Elles font la loi. «Elles sont un fardeau pour l’Afrique.» Leur notation sur le risque associé aux pays africains justifie des taux de garantie sur les prêts trop élevés.
Sur ce sujet: Comment le Sénégal compte échapper à la malédiction des hydrocarbures
* * *Image de couverture: Matthieu Spohn pour Le Temps

Mercredi 03 janvier 2024, 15h00 - LIRE LA SUITE
Partager : 
15h00

La Suisse affine, le Sénégal s'efface

03h03

A Anvers, le négoce de diamants affine ses réponses aux sanctions contre Moscou

19h05

UBS efface le traumatisme Credit Suisse sur le marché de la dette








Ross Douthat (New York Times) : "Je placerais pas mal d’argent sur la réussite de la France au XXIe siècle" 14 avril
Lexpress.fr
Fusions bancaires: La branche suisse de Société Générale est à vendre 04 avril
TribuneDeGeneve.ch
«Sept magnifiques» contre «Granolas», des destins boursiers contrastés 30 mars
LeTemps.ch
Olena Tregub : "En Russie, on apprend aux écoliers qu’il faudra un jour s’emparer de Paris et de Berlin" 09 avril
Lexpress.fr
Jean-Charles Naimi est décédé 15 avril
Agefi.fr
Faillite prononcée pour le holding faîtier de Cassis & Paprika 02 avril
Lalibre.be
Les deux armes, suisses et secrètes, de TotalEnergies 06 avril
LeTemps.ch
CNP Assurances désapprouve la stratégie climat d’Amundi 03 avril
Agefi.fr
Biogaran racheté par un Indien, le scenario cauchemar du secteur des génériques 17 avril
Lesechos.fr
Turkish Airlines a écrasé l'an dernier ses concurrents européens 05 avril
Lesechos.fr
Le retour dans l’édition d’Arnaud Nourry, ex-patron de Hachette 05 avril
LePoint.fr
Quand voir des biais cognitifs partout devient un piège, par Julia de Funès 08 avril
Lexpress.fr
«Je n'ai aucune réservation» : à 100 jours des JO, la désillusion des hôteliers et propriétaires d’Airbnb 17 avril
Lefigaro.fr
Boeing : quelles compagnies possèdent le plus d’avions dans le viseur du régulateur américain? 20 avril
Lefigaro.fr
La fusion de Crelan et Axa Bank entraînera la suppression de 150 emplois "à long terme" 23 avril
rtlinfo.be