
Après Genève il y a un mois, un nouveau cycle de négociations visant à résoudre la guerre commerciale entre Washington et Pékin débute lundi à Londres. Les exportations chinoises de terres rares sont au cœur des discussions
Tous les regards sont tournés vers Londres. Cette nouvelle rencontre entre les deux premières puissances économiques mondiales est suivie de très près par les marchés. Les analystes considèrent cependant qu’elle devrait être moins fructueuse qu’à Genève, quand les deux pays avaient convenu d’abaisser considérablement leurs droits de douane respectifs pour 90 jours.
Washington et Pékin se sont refusés à révéler le lieu de cette seconde ronde de négociations, ainsi qu’à toute indication sur leur déroulement. La délégation américaine est composée du secrétaire au Trésor, Scott Bessent, celui au Commerce, Howard Lutnick, et du représentant de la Maison Blanche pour le Commerce (USTR), Jamieson Greer. Côté chinois, le vice-Premier ministre, He Lifeng, mène la délégation, comme lors des négociations en Suisse.
«Cette réunion devrait bien se passer», a assuré sur son réseau social Truth Donald Trump. La rencontre à Londres intervient après un brusque accès de tension la semaine dernière, le président américain ayant accusé Pékin de ne pas respecter les termes de l’accord de désescalade signé à Genève. Un premier échange téléphonique a ensuite eu lieu jeudi entre les présidents américain et chinois, conversation qualifiée de «très positive» par Donald Trump.
Prudence de mise
L’un des principaux points des négociations porte sur les exportations chinoises de terres rares, des minerais critiques indispensables pour l'industrie et sur lesquels Pékin exerce un monopole mondial. Elles constituent depuis longtemps un sujet de tension. «Nous voulons que les terres rares, les aimants qui sont essentiels pour les téléphones portables et tout le reste circulent comme ils le faisaient avant le début du mois d’avril, et nous ne voulons pas que des détails techniques ralentissent ce processus», a déclaré Kevin Hassett, le principal conseiller économique de la Maison-Blanche, dimanche dans l’émission Face the Nation de la chaîne CBS. «Et c’est clair pour eux».
Les analystes se montrent circonspects. «La prudence est de mise», a souligné Susannah Streeter, analyste d’Hargreaves Lansdown. Bien que des progrès soient évoqués pour «permettre aux entreprises américaines d’accéder plus facilement» aux terres rares chinoises, «l’issue d’autres différends commerciaux demeure très incertaine», a-t-elle relevé.
De son côté, la Chine aimerait «que les États-Unis reconsidèrent les restrictions à l’immigration des étudiants, les limitations d’accès aux technologies avancées, notamment aux microprocesseurs, et facilitent l’accès des fournisseurs technologiques chinois aux consommateurs américains», explique Kathleen Brooks, directrice de recherche pour XTB. «L’issue de ces discussions sera cruciale».
Les exportations chinoises freinées
A Genève, Washington avait accepté, après deux jours de négociations, de ramener les droits de douane sur les produits chinois de 145% à 30%, en échange d’un mouvement similaire par Pékin, de 125% à 10% sur les produits américains, pour une durée de 90 jours. Ce compromis a permis aux deux puissances de mettre temporairement un terme à l’escalade de droits de douane lancée début avril par Donald Trump
Ces surtaxes semblent avoir déjà des effets concrets sur les échanges. Les exportations chinoises vers les Etats-Unis ont ainsi chuté en mai de 12,7% sur un mois, à 28,8 milliards de dollars (23,6 milliards de francs), selon les Douanes chinoises. «La guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis a entraîné une forte baisse des exportations vers les Etats-Unis mais cette baisse a été compensée par une augmentation des exportations vers d’autres pays», a écrit Zhiwei Zhang, économiste du cabinet Pinpoint Asset Management.
Les exportations totales de la Chine ont progressé en mai de 4,8% sur un an. Un résultat bien inférieur aux prévisions d’économistes interrogés par l’agence Bloomberg, qui tablaient sur une hausse de 6%. «Les perspectives commerciales restent très incertaines à ce stade» et des problèmes pourraient survenir «à mesure que l’effet d’anticipation s’estompera», note l’expert, en référence aux acheteurs étrangers qui avaient augmenté leurs commandes de produits chinois en prévision des possibles hausses des surtaxes américaines.