
COMMENTAIRE. Comme CREDIT SUISSE, Tornos a accompagné l’essor de la Suisse. Son mariage de raison avec Starrag rappelle que rien n’est jamais acquis. D’où l’importance de régénérer le tissu économique suisse
Après 150 années d’activité, «Tornos ne peut pas disparaître». Affirmation assénée plus souvent qu’à son tour par les protagonistes et autres observateurs de la fusion entre le fabricant de machines-outils de Moutier et le groupe saint-gallois Starrag, qui devient effective ce vendredi. Une opération que pratiquement personne ne conteste. Dans une industrie qui a vu ses marges fondre, caractérisée par des entreprises de taille moyenne, créer un acteur d’une taille suffisante pour régater face à la concurrence semble inévitable.
Le temps dira si la stratégie industrielle de l’entrepreneur Walter Fust et de sa garde rapprochée sera gagnante. Il révélera aussi si le nom Tornos survivra à ce mariage de raison. Même si les tours automatiques prévôtois sont mondialement connus, le risque est grand de voir à terme la célèbre marque, symbole de l’industrialisation de l’horlogerie suisse, cantonnée à une gamme de produits et le pavillon Starrag flotter sur le site bernois – jurassien dès 2026 – du groupe.
### Inlassablement encourager la relève
De quoi rappeler, neuf mois après la mort clinique de
CREDIT SUISSE, qu’aucune entreprise, aussi iconique, emblématique soit-elle, n’est éternelle. Si la «banque des entrepreneurs» ne devait pas mourir, c’est parce que, au nom de son importance systémique, tout un dispositif avait été mis en place pour éviter sa faillite. La voie imprudente empruntée par l’établissement, sa gestion nonchalante des risques, méritait, elle, en revanche d’être sanctionnée comme elle l’a été.
Tout comme un être humain, une entreprise est donc une simple mortelle. Evident, ce constat darwiniste doit surtout pousser à cultiver et favoriser la régénération du tissu économique suisse. Les années 2010 ont posé un regard obsessionnel, un brin naïf, sur la nuée de jeunes pousses qui a éclos en Suisse. Alors que l’économie mondiale poursuit sa mue numérique, il est encore difficile de mesurer si cet entrepreneuriat très technologique réussira à créer les champions économiques de demain. Seule certitude, il faut tout faire pour que ce soit le cas, en favorisant et récompensant l’esprit d’entreprise si cher à la Suisse.
L’acceptation de l’échec, qui n’est plus synonyme de stigmatisation économique, représente à ce titre une évolution encourageante. A l’inverse, il reste inquiétant de noter que, dans l’un des pays les plus riches du monde, le financement est toujours pointé comme le principal frein à l’essor rapide des start-up.