
ÉDITORIAL. Si les partis approuvent le contrat de coalition présenté mercredi à Berlin, le leader de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) devrait devenir le nouveau chancelier allemand. Sa priorité: recréer les conditions-cadres permettant à l’économie allemande de retrouver son dynamisme. Mais aussi inscrire son action au bénéfice de l’Europe
Dans le tourbillon géopolitique actuel, l’avènement d’un gouvernement de coalition à Berlin, après six semaines de négociation, est une nouvelle positive. Première économie européenne, l’Allemagne a besoin de deux choses a priori paradoxales: de stabilité et d’élan. Si le contrat de coalition doit encore être approuvé par la CDU/CSU et les sociaux-démocrates du SPD, la probable élection, le 7 mai, du conservateur Friedrich Merz à la Chancellerie constitue une alternance politique dont le pays avait besoin.
Face à la montée dangereuse de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), qui est devenue en février la deuxième force politique du pays, un chancelier chrétien-démocrate est mieux placé pour faire barrage à l’extrême droite. A une condition: qu’il continue de refuser de s’allier avec elle.
Longtemps montrée en modèle de dynamisme économique et de stabilité politique, l’Allemagne a été fortement déstabilisée par la guerre en Ukraine, qui l’a contrainte à revoir radicalement sa politique de défense. Elle va investir plus de 100 milliards d’euros pour renforcer la Bundeswehr. Elle est aussi fortement secouée par une administration américaine qui a fait de Berlin son bouc émissaire préféré. Or depuis 1945, les Etats-Unis ont été un élément structurant majeur du développement de l’Allemagne. Si l’on y ajoute un risque de récession pour la troisième année consécutive et une industrie automobile en plein doute, nos voisins d’outre-Rhin ont de quoi s’interroger sur leur devenir.
Friedrich Merz a toutefois donné des signaux encourageants. En réussissant à convaincre le SPD et les Verts de la nécessité d’assouplir le frein à l’endettement, totem de l’austérité allemande qui a longtemps paralysé les investissements, il place le pays en condition de se moderniser et de se projeter dans un futur plus prospère. De Gerhard Schröder à Olaf Scholz en passant par Angela Merkel, les derniers chanceliers ont omis d’investir dans des infrastructures aujourd’hui obsolètes et se sont reposés sur une rente de situation axée sur les exportations et un gaz russe à bon marché. Le génie industriel allemand piaffe désormais d’impatience pour bénéficier de conditions-cadres dignes de ce nom.
Enfin, avec une administration Trump qui fait de la détestation de l’Europe sa marque de fabrique, le discours très pro-européen de Friedrich Merz est rassurant. L’Allemagne doit être l’un des moteurs de l’affirmation géopolitique du Vieux-Continent, écartelé entre l’Amérique et la Chine.