
ÉDITORIAL. Accusant l’Empire du Milieu de concurrence déloyale, l’Union européenne pourrait surtaxer dès juillet les véhicules électriques chinois. La prudence de Sioux dont elle fait preuve dit tout de ses divisions et de ses limites
Comme un air de déjà-vu. Après le lancement tonitruant en octobre dernier d’une enquête visant des constructeurs automobiles chinois, l’Union européenne hausse le ton. Tout en laissant la porte ouverte à une solution négociée d’ici à juillet, Bruxelles menace désormais la deuxième puissance économique mondiale de sanctions, sous forme de droits de douane majorés.
De l’autre côté de l’Atlantique, il y a quelques semaines, Washington n’avait plus tergiversé: les Etats-Unis, moins dépendants de la Chine, imposent depuis mai des droits de douane de 100% sur les voitures chinoises. Selon les conclusions des investigations européennes, les véhicules produits par BYD et d’autres marques bénéficient de soutiens publics massifs, de différentes formes, menant à une dangereuse concurrence déloyale.
### Mortifères dépendances
Sur le Vieux-Continent, l’affaire ressemble à une tragédie qu’on repasserait en boucle. Un scénario identique s’est déjà joué au début des années 2010 dans l’industrie photovoltaïque, alors prospère. L’épilogue est connu: face aux menaces de rétorsion, l’UE avait plié, renonçant à taxer les panneaux solaires chinois bon marché qui inondaient le marché. Les faillites et les rachats se sont enchaînés, notamment en Allemagne, haut lieu d’un secteur aujourd’hui sinistré.
Dans une Union européenne qui parvient décidément rarement à s’entendre, Berlin se montre plutôt hostile à des mesures protectionnistes. Celles-ci risquent de déclencher une guerre commerciale dans laquelle des entreprises telles que
VOLKSWAGEN ou BMW ont beaucoup à perdre: elles sont beaucoup plus présentes sur sol chinois que leurs homologues français.
Bien malin qui pourrait prédire aujourd’hui l’issue du bras de fer auquel Bruxelles et Pékin vont se livrer. Double, l’enjeu est de taille. Il n’y va en effet pas seulement de l’avenir économique d’une Europe en déclin. C’est aussi la transition énergétique qui se joue: fatalement, plus le prix des voitures électriques augmente, plus la perspective d’une réduction rapide des émissions de CO2 s’éloigne.