
Les fabricants de montres suisses font face à la première correction sérieuse sur le marché chinois. C’est un signe: ce relais de croissance a atteint sa maturité. Il est temps d’en construire un autre
L’horlogerie est malmenée par la Chine, tous les chiffres ne ramènent qu’à ça depuis quelque temps. Les résultats partiels de Swatch Group et de Richemont ont démontré le poids de la demande chinoise, et par extension hongkongaise. Les statistiques d’exportation du mois de juin enfoncent le clou: -36,5% pour la Chine, -23,1% pour Hongkong. Il faut bien sûr prendre ces chiffres avec une certaine distance. Ce ne sont pas des faits comptables, juste des indications. Néanmoins, la tendance est lourde et les signaux macroéconomiques en provenance de l’Empire du Milieu ne donnent pas encore de visibilité sur le prochain retour d’un cycle haussier.
L’horlogerie suisse doit sans doute s’habituer à cette nouvelle configuration. Un mal pour un bien, car cela reflète aussi la maturité d’un marché chinois qui a tenu un rôle central dans la croissance phénoménale du dernier quart de siècle. Rappelons que les exportations horlogères sont passées de 10 milliards de francs en l’an 2000 à près de 27 milliards en 2023. Sur la même période, les expéditions vers la Chine ont flambé, de 45 millions de francs à 2,7 milliards. La correction actuelle se situe donc à un haut niveau et le potentiel ne semble toujours pas épuisé.
### **L’Inde presque au niveau de l’Autriche**
La situation apparaît d’autant moins désespérée que tous les relais de croissance n’ont pas été épuisés. Les dirigeants de marques regardent en particulier du côté de l’Inde et ils ont raison. En 2023, le sous-continent se situait au 23e rang des pays d’exportation, juste devant l’Autriche.
Si l’on prend la Chine plutôt que l’Autriche comme point de comparaison, il paraît évident que l’Inde n’a même pas commencé à libérer son potentiel. D’autant plus que les consommateurs indiens auraient le goût du luxe. Selon le cabinet Deloitte, ils seraient 78% à projeter l’achat d’une montre dans l’année. La projection donnera le frisson à tout l’Arc jurassien. Mais ne nous emballons pas. L’accord de libre-échange entre la Suisse et l’Inde vient tout juste d’être mis sur le papier et il doit encore être validé par les Chambres. Si l’on se base sur l’exemple de la Chine, il a fallu près de dix ans entre son entrée dans l’OMC (Organisation mondiale du commerce) et le franchissement du milliard de francs d’exportations. L’horlogerie est habituée à travailler sur le temps long. Elle trouvera bien les moyens de composer avec le nouveau paradigme chinois, en attendant de conquérir l’Inde.